La carte scolaire béninoise fait de l’Atlantique l’un des départements le plus peuplé avec huit (8) communes, trois groupes pédagogiques (Sô-Ava-Abomey-Calavi, Kpomassè-Tori-Ouidah (KTO) et Allada-Toffo-Zè), cent un (101) établissements publics composés de quatre-vingt-seize, (96) CEG et cinq (05) lycées, cinq cent soixante et un (561) établissements privés reconnus sans oublier les établissements clandestins dont l’existence est connue d’une manière ou d’une autre. Réalités et performances éducatives, préparation des examens et défis à réaliser, Educ’Action fait le point avec Dr Edmond Houinton, Directeur Départemental des Enseignements Secondaire Technique et de la Formation Professionnelle (DDESTFP) de l’Atlantique. Lisez plutôt !
Educ’Action : Quel est l’état des lieux de votre département ?
Edmond Houinton : L’existant est satisfaisant. Dans le département, les enfants travaillent bien. Au titre des examens ces cinq (5) dernières années, nous avons occupé la 2ième, 3ième et 4ième place. Avec le confinement, nos résultats ont été plombés parce que les examens blancs n’ont pas été aussi merveilleux qu’on l’aurait espéré. Nous n’avons pas eu ce que nous cherchions, notamment avec le BEPC. Vous savez, ces candidats sont encore petits, donc ils n’ont pas encore pris le taureau par les cornes, mais je voudrais féliciter ceux qui ont pu sortir la tête de l’eau. Pour le Bac, je crois que ça peut aller parce que nous avons obtenu près de 33%. Eux, autres, ont compris l’enjeu, mais les petits, pas encore. Dans les établissements, je note que les apprenants se comportent bien même si on note, par endroits, quelques brebis galeuses qui donnent du fil à retordre aux chefs d’établissements. Nous notons certaines déviances au niveau du comportement et de la morale sexuelle, mais avec le projet d’établissement et le contrat de performance qui est demandé aux chefs d’établissement, ils ont le devoir d’amener les élèves à travailler parce qu’à la fin, ils doivent rendre compte. Les établissements du Bénin sont les mêmes mais notre particularité c’est que nous sommes très nombreux. C’est le département le plus grand en termes d’apprenants et d’acteurs du système éducatif. Nous sommes à côté du Littoral et ici ça s’amuse trop. Les apprenants ne s’adonnent pas pour autant aux études. Il faut qu’on les bouscule.
Les années antérieures, de nombreux cas de 00% aux examens provenaient du département, comment vous êtes-vous préparé cette année pour éviter pareille situation ?
Depuis un mois, nous avons sorti une note de service pour demander à chaque chef d’établissement de multiplier les stratégies pour avoir de bons résultats. Au nombre de ces séances figurent des séances de renforcement des capacités à travers des exercices de renforcement qui pourront aider les apprenants. Le confinement a plombé tous nos efforts. Une fois sortis du confinement, il fallait les mettre au travail d’une manière ou d’une autre. Les cours ont déjà pris fin pour les classes intermédiaires et présentement, c’est la phase de calcul des moyennes. Dans tous les cas, le vendredi 03 juillet 2020, on doit tenir les conseils de fin d’année et garder rien que les élèves des classes d’examens dans les écoles. Les animateurs d’établissements, les professeurs principaux, les conseillers pédagogiques et les inspecteurs sont mis à contribution pour aider les apprenants. Nous avons fait les examens blancs les 2, 3 et 4 juin et ensuite nous avons organisé les devoirs pour leur dire qu’il faut être au travail. Suivant ma note de service, tous les élèves des classes d’examen n’ont pas le temps. Nous avons saucissonné les classes par groupe de 25 pour éviter le grand nombre et leur permettre d’apprendre. J’ai exigé que les examens blancs soient corrigés dans toutes les matières et que les copies leur soient rendues. Pour le devoir qu’ils ont fait le 15 dernier, tous les sujets doivent être aussi corrigés en classe et les copies doivent être rendues. Sinon parfois, les enseignants ne corrigent rien et ils disent oralement « vous ne connaissez pas la chose ! Voilà ce qu’il fallait faire, etc ». C’est exigé et les élèves prennent note.
Parmi les établissements contre-performants, on note beaucoup d’établissements privés, quelles actions avez-vous mené en leur direction pour qu’il y ait amélioration de leurs résultats ?
Sensibilisation ! Sensibilisation ! Sensibilisation ! Le vendredi 26 Juin dernier, j’ai fait appel à tous les chefs d’établissements pour leur parler des résultats, des 00% que nous avons connus les années antérieures et des décharges pour ceux du public. A l’endroit du privé, nous avons demandé aux établissements de cesser la « vente de candidats », c’est-à-dire qu’ils offrent des candidats aux grands établissements en fin d’année pratiquement. Ils ne gardent les candidats que pour un temps et ils les envoient après dans les grands établissements. Parfois ces établissements ne veulent pas les accepter étant donné que le savoir qui leur a été communiqué n’est pas celui qu’il fallait et c’est maintenant qu’il faut réajuster ses connaissances. Ce sont ces établissements vendeurs qui obtiennent les 00%. Vous n’allez jamais voir des établissements sérieux avoir 00%. On a découvert des choses qu’on ne peut pas vous dire et c’est grâce à nous que ces élèves ont commencé à aller en classe. Je prie que nous n’ayons pas 00%.
Avez-vous confiance en vos candidats ?
Je suis allé dans un établissement privé tout à l’heure et j’ai vu que ça travaillait bien. Tout à l’heure je vais passer dans deux autres établissements privés avant d’aller au bureau. Mon souci, c’est de continuer à sensibiliser les directeurs parce qu’il me reste encore 07 jours, à motiver les apprenants et les enseignants. Pour moi, les motiver, c’est de les appeler et leur parler comme un père de famille parce que dans le milieu scolaire, l’enseignant fait beaucoup et on ne peut pas le payer pour tout ce qu’il fait.
Quels sont les principaux défis de votre département en matière d’éducation ?
Mon premier défi, c’est que tout le monde aille à l’école parce que nous constatons que dans les régions reculées comme Zè, Kpomassè, Sô-Ava, les gens ne veulent pas aller à l’école. C’est donc d’accompagner le gouvernement dans cette vaste mission d’envoyer tout le monde à l’école. Deuxième chose, avoir de bons comportements ici. Aujourd’hui, l’objectif c’est de limiter la propagation du Coronavirus. C’est pour cela qu’on a vite renvoyé les élèves des classes intermédiaires à la maison. Il faut montrer aux gens que le mal existe et faire en sorte que les apprenants ne soient pas contaminés. Le troisième défi, c’est de faire en sorte que l’apprenant puisse se prendre en charge demain. Les enseignements technique et professionnel sont de mise. J’ai fait l’enseignement général jusqu’à obtenir mon doctorat mais que sais-je faire ? Bavarder ! Alors, il faut que nous changions de fusil d’épaule. C’est en travaillant qu’on pourra y arriver et en demandant à l’Etat de nous aider en mettant les moyens à notre disposition. Par exemple, le seul véhicule que j’ai ne me permet pas de tout faire.
Avez-vous un appel à lancer aux candidats, aux parents et aux enseignants en cette veille d’examen ?
Je voudrais inviter tous les candidats au travail et à la sérénité. Nous préparons le BEPC pour le 13 Juillet et c’est dire que toute cette semaine ne sera pas de tout repos. Ce n’est pas pour autant que les candidats vont travailler à se rendre fou, non ! Il faut qu’à 22 h 30 au plus tard, le candidat soit au lit. A 5 heures du matin, il se réveille pour continuer. Je voudrais demander aux parents de surveiller les candidats. Nous traversons la saison des pluies, il y a donc trop de moustiques et trop de maladies. Ils ne doivent plus manger des aliments huileux, des repas lourds qui vont les endormir. Il faut mettre à leur disposition tout ce dont ils ont besoin pour travailler. Ce n’est pas le moment de demander aux élèves-filles d’aller vendre quelque chose avant de venir travailler. Nous devons être premiers.
Propos recueillis par Adjéi KPONON