Sensibilisation des apprenants sur le sexe et études : Des parents se défendent et brandissent des approches, des spécialistes démontent et conseillent - Journal Educ'Action - Éducation au Bénin et dans le monde
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Sensibilisation des apprenants sur le sexe et études : Des parents se défendent et brandissent des approches, des spécialistes démontent et conseillent

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Dérives sexuelles, abus sexuels, dépravation des mœurs, Bref !, L’école est agressée de toute part dans un environnement où aucun contrôle ne semble être possible. Pire encore, la technologie semble renvoyer aux vestiaires l’éducation reçue par les enfants en ouvrant la porte aux vices. Les apprenants de tous âges se retrouvent entrainés par un monde où tout va à une vitesse grand V, notamment en ce qui concerne leur vie sexuelle qui les expose ainsi à une rencontre précoce avec la sexualité. Après les apprenants et l’administration scolaire, c’est le tour des parents d’élèves, psychopédagogues et responsables d’ONGs d’opiner sur l’épineuse question de la combinaison du sexe et des études en milieu scolaire.

Les dérapages qu’on pourrait observer entre apprenants en termes de relations amoureuses et sexuelles sont nombreux et concernent surtout un mauvais contrôle. « L’individu qui est encore dans son adolescence, qui ne contrôle pas encore toutes les choses, qui est en train de découvrir la sexualité, qui est en train de découvrir les relations entre hommes et femmes, va se retrouver dans une situation où tout est permis, c’est-à-dire qu’on est à un moment de sa vie où on a envie de tester de nouvelles choses, on a envie d’avoir des sensations fortes. Cela pourrait être le lieu d’une sexualité débridée », explique Bernice Adeossi, médecin pédopsychiatre (psychiatre des enfants et adolescents) au Centre National Hospitalier Universitaire de Psychiatrie de Cotonou (ancien Jacquot) au sujet des dérapages observés entre apprenants en termes de relations amoureuses et sexuelles. Suivant les confidences de la spécialiste de la maladie mentale, on a déjà pu rencontrer des jeunes qui se sont laissés entraîner ou qui ont eu envie de tester des choses fortes, qui sont partis dans des partouzes, dans des relations sexuelles à plusieurs, dans des relations sexuelles qui ne sont pas tout à fait habituelles. Conséquences, poursuit-elle, cela peut conduire même à la pornographie, donc dans d’autres formes de sexualité dont ils ne maîtrisent pas les conséquences et les implications. « On peut également parler du multi partenariat sexuel avec la possibilité de contracter une maladie ou une infection sexuellement transmissible ou avec des grossesses où l’auteur est difficile à identifier, avec les conséquences que cela va avoir sur la vie de l’individu », martèle-elle.

Etudes et sexe à l’école : Le rôle des parents dans la sexualité responsable des apprenants

Parlez-vous des sujets de sexualité avec vos enfants pour leur éviter de tomber dans de nombreux pièges ? A cette question posée à des parents pour la plupart non instruits, la réponse est négative. Dame Delphine est commerçante à Godomey, mère d’une fille âgée d’environ 15 ans, elle explique sa méthodologie à elle. « J’avoue que je n’ai jamais parlé de ce genre de choses avec ma fille qui est en classe de 4ème et d’ailleurs je ne sais pas comment faire asseoir son enfant pour lui dire de telles choses. Mais au moins, dans nos discussions de mère et fille par moment, je lui dis d’éviter les mauvais conseillers, de ne pas se laisser berner par les garçons et que si l’un d’entre eux venait à lui dire quelque chose qui sorte de l’ordinaire, de venir m’en parler », a laissé entendre dame Delphine, la quarantaine. Dame Alice (prénom donné pour la circonstance) renseigne sur les mesures qu’elle prend pour l’orientation sexuelle de sa fille. « Au début, je ne discutais pas de sexe avec ma fille. Mais lorsqu’elle a commencé à avoir ses premières règles, j’ai commencé à l’éduquer à ce sujet. Je lui faisais part de tout ce qu’elle pouvait rencontrer, étant devenue maintenant une jeune fille. Les comportements qu’elle devait avoir dans telle ou telle situation face aux garçons. Comme éviter le fait d’aller dans leurs maisons, éviter d’être seule avec un homme dans des endroits isolés, éviter les offres, éviter également les mauvaises compagnies. Je lui faisais part des répercussions que cela pouvait avoir sur elle, comme par exemple tomber enceinte, être infectée par une maladie sexuellement transmissible », confie-t-elle. Pour sa part, Arnaud Konkongnissou compte sur sa rigueur pour que sa fille ne soit pas listée parmi les filles dépravées. « Il faut voir le genre de parent qu’on a avant de vouloir se lancer dans ces choses. Elle sait que je ne tolère pas certaines choses et je crois qu’elle n’oserait pas se faire compter parmi les enfants qui se donnent au sexe n’importe comment », a-t-il averti en insistant sur le fait qu’il faut priver les enfants des portables androïd et de la télévision. Parlant de télévision, la fille de Edouard n’en regarde plus depuis des années. Et pour cause : « Les gens s’embrassent et font l’amour n’importe comment et les enfants fixent leurs yeux pour regarder tout cela et on espère qu’ils ne le feront pas au dehors ? Mensonge ! Voilà pourquoi j’ai vendu ma télévision depuis des années », a confié ce père de famille dont la benjamine est en classe de 5ème. Néanmoins, ce parent d’élève fait de son mieux pour que sa fille n’ait pas à tomber dans les nombreux pièges. « J’essaie de répondre à ses besoins et lui expliquer avant tout que les garçons existent avant elle et existeront après elle et qu’il faille patienter et finir les études ». Dans sa peau de parent d’élèves, Laurent Aurélien Agossou, surveillant général du CEG Dantokpa explique comment il arrive à éduquer sa progéniture. « Mon épouse ne le fait pas, mais moi je le fais. Quand l’enfant a un certain âge, on sait que physiologiquement, il aura besoin du sexe opposé et on commence à lui parler et moi je profite de leur tenue et des télés novelas, pour leur parler. On peut être en train de regarder ensemble la télévision et je profite pour leur dire tu penses que ce qu’ils font là est bon ? Cela devient déjà le début du débat sur le sujet ou si c’est une fille, je demande si les gens ont commencé à la courtiser et pourquoi elle ne me dit rien. A cette question, les enfants disent non d’abord mais quand on sait que papa s’intéresse à ce sujet, elle commence à dire, tel m’a dit telle chose et les réponses à donner pour que les garçons les laissent, je les formule avec eux », a-t-il détaillé. Pour tout clore, dame Léa, revendeuse à Godomey et mère de deux filles, dira tout simplement : « c’est Dieu qui éduque les enfants. Le parent aura beau tout mettre à la disposition de ses enfants, il aura toutes les discussions avec eux, si l’enfant ne veut pas entendre ce que l’on dit, il ne le fera pas. C’est pourquoi, je demande à Dieu de m’aider à mieux éduquer les miens.

Combinaison sexe et études : L’éclairage du psychopédagogue sur les répercussions

«Un élève qui s’adonne de façon précoce à la sexualité, au rapport sexuel, on peut rapidement constater chez lui, un mauvais rendement, à commencer par le fait qu’il ne donnera pas de bons résultats scolaires. Il y aura la perte de concentration. Lorsqu’il voudra étudier, le plaisir d’étudier ne sera plus trop au rendez-vous parce qu’il a commencé à chercher à jouir, à se donner ce plaisir sexuel qui comme la drogue dépasse déjà l’envie de prendre le cahier et d’étudier ». C’est par ces propos que Jean Akowe, psychopédagogue plante le décor en faisant cas des premières conséquences qui peuvent deteindre sur le rendement d’un élève s’adonnant aux pratiques sexuelles. Déjà énoncé à l’entame de ce dossier dans la parution précédente, le sexe et les études ne vont pas de pair. Cependant, nombreux sont ces élèves qui jumellent les deux approches et ceci grâce à un certain nombre de facteurs qui ne résultent pas forcément de ce que le psychopédagogue va qualifier d’ « infections à travers les médias » mais aussi des mauvaises conditions de vie auxquelles font face ces enfants. Il explique : « Les TICS nous offrent les films, les feuilletons qui vont prédisposer à vouloir passer à l’acte, à être un peu curieux. Le jeune garçon, la jeune fille curieuse peut chercher à voir, à goûter à ce plaisir et une fois que la jeune fille ou le garçon se donne à cet acte, il ou elle va commencer à désapprendre, ce qui peut entraîner la déscolarisation de la plupart des jeunes filles surtout celles de la seconde jusqu’en première. Quand on étudie, quand on approfondit, on remarque tout simplement qu’il a déjà pris goût à des éléments qui dépassent les études. Il n’a plus sa tête dans les études comme on a l’habitude de le dire. De façon traditionnelle, souvent c’était au mariage qu’on pouvait parler de rapport sexuel. Aujourd’hui, on dira que nous sommes à la modernisation. Mais cette modernisation nous permet-elle d’évoluer, de donner le meilleur de nous-même, de cultiver les potentialités pour offrir aux générations futures quelque chose qui est meilleure ? On en abuse et cela a de l’impact sur presque tout le monde et spécialement sur les jeunes, cela détruit leurs études et leur évolution ». Par ailleurs, parlant des parents, Jean Akowe insiste sur leur rôle principal dans l’éducation sexuelle de leurs enfants, arguant ainsi qu’ils ne doivent plus faire du sexe un sujet tabou. Pour lui, les parents, par rapport à leur rôle premier d’éducateur, sont vraiment interpellés depuis le bas âge de l’enfant. Ils doivent d’abord apprendre à l’enfant à maîtriser son ventre puis ensuite son bas ventre car les deux sont très liés. « Si on n’apprend pas à l’enfant la maîtrise de soi, la patience, on n’organise pas la vie de l’enfant à accorder un temps pour chaque chose et que chaque chose doit être réalisée en son temps, alors ils confondent les possibilités et l’essence, c’est possible donc je peux le faire. Ce n’est pas tout ce qui est possible qu’on peut faire. Il faut l’aider à pouvoir se maîtriser, à pouvoir attendre le moment opportun avant de ‘‘manger’’. Avant de manger, il faut faire ceci et cela serait des actes que les parents doivent poser envers les enfants », a-t-il fait savoir à Educ’Action. Ainsi, les parents doivent éduquer leurs enfants en ce sens qu’ils puissent apprendre à se maîtriser, à être patient et avoir une vie bien organisée et comme cela plus tard, savoir qu’ils sont à l’adolescence et qu’ils ne sont pas matures. Pour finir Jean Akowe, revient sur les conséquences des pratiques sexuelles en milieu scolaire : « Le jeune qui se donne à ces actes n’aura pas l’énergie aussi nécessaire pour pouvoir se concentrer au maximum sur les études. Donc, la baisse de concentration, la déscolarisation, l’absence d’énergie vitale nécessaire pour bien étudier va lui manquer et comme cela son rendement va chuter ».

Les risques psychiatriques d’une sexualité précoce en milieu scolaire 

«Comme risques d’une sexualité qui débute trop tôt, notamment en milieu scolaire, on peut citer la déception amoureuse. C’est la chose la plus fréquente sauf que d’un point de vue psychiatrique, cela peut constituer un facteur dépressiogène ou un facteur de stress qui va favoriser le déclenchement d’une maladie mentale plus grave. Le risque d’une grossesse précoce avec tout ce que cela peut impliquer au point de vue psychiatrique, la difficulté de se projeter dans un processus parental, de pouvoir assumer un rôle de parents avec tout le stress que cela va engendrer, avec la possibilité de développer une dépression ou de faire une psychose puerpérale. Les grossesses précoces peuvent être à risque de faire déclencher chez l’individu, autant chez le garçon que chez la fille, ce que nous appelons les troubles psychiques de la gravido-puerpéralité. C’est toutes les maladies mentales autour de la grossesse et de l’accouchement. Nous pouvons également citer le risque d’infection à VIH avec ses conséquences, notamment la dépression. La dépression revient souvent. Et aussi toutes les psychoses liées à l’infection à VIH et au traitement, parce que le VIH peut aller au niveau cérébral et entraîner des maladies cérébrales qui vont donner des symptomatologies psychiatriques. Le traitement de l’infection à VIH également peut donner certaines pathologies psychiatriques. Nous avons également un risque de viol parce que à l’adolescence on parle de personnes qui sont dans une sexualité ‘’mal contrôlée’’. Ils sont dans des impulsions, ils ont des comportements impulsifs, donc qui ont du mal à contrôler leur sexualité, leur libido. Donc, ils vont potentiellement être des agresseurs sexuels, c’est-à-dire que le jeune garçon qui a envie d’avoir une relation sexuelle, qui se retrouve face à une jeune fille qui lui dit non, étant donné qu’il est à un moment de sa sexualité où il a du mal à contrôler ses pulsions, il peut se rendre auteur d’un viol. Parfois, quand le partenaire n’est pas prêt psychiquement et même physiquement à avoir des relations sexuelles cela peut être un traumatisme psychique que l’individu va traîner le reste de sa vie. On peut également avoir dans une sexualité qui débute trop tôt quelque chose de l’ordre d’une addiction au sexe ». Voilà autant de risques de la sexualité en milieu scolaire que Bernice Adeossi, médecin pédopsychiatre (psychiatre des enfants et adolescents) au CNHUP de Cotonou (ancien Jacquot) a accepté renseigner volontiers les reporters de Educ’Action.

 

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