La grande balade emprunte de connaissances et de savoirs sur l’Education à la Santé Sexuelle prend ainsi fin à ce carrefour, sur les cendres de cette quatrième et dernière parution de la série du mois de Mai. Comme arguer, nous avons tenu promesse gardant allumer les flammes de l’éveil sur une thématique nouvelle et donc entourée de susceptibilités, d’appréhensions et de doutes avec une douce dose de rejet . Chacun y est allé de sa compréhension, de son ressentiment et même de son aversion pour un chantier pourtant novateur qui tend à forger, à la longue des apprenants responsables vis-à-vis de leur santé sexuelle, des citoyens de type nouveau qui ont un rapport plus affiné, courageux et surtout mature avec l’ESS. Enseignants formés, inspecteurs, conseillers pédagogiques édifiés, cadres de ministères outillés… En somme, un continuum d’hommes et de femmes aguerris pour porter le rêve d’un enseignement qui fait corps avec l’homme et la société pour espérer une génération de concitoyens mus par les questions de la santé sexuelle. Ongs, chefs religieux ont aussi contribué à cette campagne réflexive et de construction des contenus éducatifs. L’heure est à l’expérimentation. Des lauriers par ici, des remous par là, telle est l’actualité de l’ESS. Seul l’accouchement à la phase du bilan permettra de tirer les grands enseignements, les grandes conclusions pour ajuster le navire ESS dont la consécration se lira et se dessinera aux encablures des comportements de nos apprenants sur la piste de la sexualité. Educ’Action, proche des questions et des grands enjeux de l’éducation, a ainsi joué sa partition, celle d’aider à scruter l’arène d’un programme nouveau, d’une approche nouvelle sur fond de certitudes et d’incertitudes. Lisez plutôt !
Education à la Santé Sexuelle : L’Eglise Catholique récuse la démarche
L’introduction de l’Education à la Santé Sexuelle dans le milieu scolaire, surtout à la maternelle et le primaire, semble ne pas être du goût de l’église catholique. Le Père Coovi Janvier Sodohoun du diocèse de Lokossa a déclaré, à suffire, son déni de voir enseigner cette discipline à ce stade de l’instruction scolaire : « Introduire la sexualité dans le milieu scolaire, surtout à bas âge dans la maternelle et le primaire, est une réalité qu’on peut dire déplorable parce que l’enfant est innocent et le détruire dès le bas âge, c’est une erreur, c’est même un crime contre la vie. » Il va plus loin : « … quand l’enfant nait et qu’on doit l’éduquer, on commence d’abord par lui donner le lait maternel. Après 6 mois, on ajoute d’autres choses. Donc ça veut dire que l’enfant est entretenu pour grandir dans les normes ». A l’en croire, la question de la sexualité relève de la compétence des grandes personnes, et non des tout petits. Tout en approuvant que les enseignants semblent les mieux indiqués pour entretenir les apprenants sur le sujet, il estime, tout de même, que l’Eglise Catholique ne peut accepter cette procédure parce que derrière cette mentalité, ‘’on voit un courant de destruction de l’humanité, de l’homme et de la famille. Pour Rodrigue Azanmasso de la congrégation des Eudistes et Vicaire de la paroisse Sainte Thérèse de Godomey, il faut comprendre que l’être humain évolue étape par étape. « Un enfant ne peut pas comprendre certaines choses. Lorsqu’on lui offre une chose dont il n’a pas la connaissance, il l’utilise mal. La maturité humaine est quelque chose qui s’acquiert dans le temps. Plus on grandit, plus on comprend. Donc, il y a des gens qui ont une maturité trop rapide, d’autres plus lente et plus longue. Au nom de tout cela, on ne peut pas débattre, très tôt, de certaines choses avec les enfants », a-t-il martelé, arguant que l’Eglise n’est pas contre l’accompagnement responsable des adolescents. Il a invité les parents à se préoccuper de l’éducation holistique de leurs enfants. « Les parents sont les premiers éducateurs sexuels de leurs enfants. Quel que soit le type de programme pensé en milieu scolaire, la maison a son rôle à jouer. Si les enfants sont bien suivis à la maison en termes d’information, il n’y aura pas de dégâts et même s’il doit y avoir, ce serait vraiment minime. C’est pourquoi aujourd’hui, l’Eglise met l’accent par exemple sur cette éducation des enfants à la base. C’est-à-dire comment aider les parents à donner une vraie éducation sexuelle à leurs enfants », a-t-il conseillé.
Religion endogène : Valse de critiques contre l’ESS depuis la maternelle
Dieudonné Dénakpo Dagbé est dignitaire de la divinité Thron Kpéto Déka Alafia. Garant et défenseur de la culture et des valeurs endogènes, il partage avec Educ’Action ses appréhensions par rapport à l’enseignement de l’Education à la Santé Sexuelle en milieu scolaire au Bénin. S’il n’est pas contre le contenu du programme, il regrette qu’on veille initier tôt les apprenants de la maternelle à cet enseignement. « On aurait dû attendre que l’enfant atteigne la classe de CM1 ou même de CM2 avant de parler avec lui de l’éducation à la santé sexualité. Personnellement, je ne pense pas que cela puisse régler le problème de la précocité des grossesses en milieu scolaire », a relevé ce gardien de la tradition, imputant, sans ambages, la responsabilité du phénomène de la précocité sexuelle en milieu scolaire aux chaînes de télévisions pour les images malsaines qu’elles diffusent dans certains de leurs programmes, et qui vont à l’encontre des mœurs, de l’éthique et des pratiques béninoises. « C’est pourquoi mes enfants ne regardent la télévision que les week-ends pour me permettre de les suivre de près et de bloquer les feuilletons tendancieux », a jouté Dénakpo Dagbé. Pour lui, seuls les enfants adultes et responsables ont droit aux débats et conseils sur l’acte précoce du sexe chez lui. Il considère que tout repose sur l’éducation dans laquelle les enfants sont moulés. « Si les parents refusent d’être des modèles pour les enfants, on ne peut espérer autre chose des enfants », a-t-il conclu.
L’Islam face à l’ESS : Seuls les apprenants responsables et intelligents pour ce type d’enseignement
Titulaire d’une Licence en Jurisprudence Islamique, Lawal Fofana est l’un des Imams de la Mosquée de la place Bulgarie à Cotonou. Passionné des questions de l’éducation, le chef religieux musulman justifie cette absence du dialogue parents-enfants sur les questions de sexualité, au fait que les enfants pourraient se donner à la fornication à l’insu des géniteurs. « Alors que la fornication est proscrite dans plusieurs religions, en l’occurrence dans l’Islam. On ne peut empêcher cet enseignement dans l’Islam, mais cela doit se faire suivant des règles. Ce qu’on craint, c’est que les enfants ne soient tentés de tester et d’y prendre goût. L’Islam n’attend pas que la maladie s’installe avant de guérir, il prévient. Tous les enfants ne sont pas dotés de la même faculté et chaque parent est censé connaître les qualités et aptitudes de ses enfants. Avec des enfants responsables et intelligents, l’Islam n’exclut pas l’institution du dialogue sur la sexualité ou tout enseignement en lien avec la santé sexuelle », explique l’Imam Lawal Fofana, déplorant le rôle de la rue dans l’éducation des enfants. Selon le chef religieux musulman, entretenir les apprenants sur l’Education à la Santé Sexualité n’est pas une mauvaise chose en soi, mais la méthode est biaisée. « Le gouvernement a décidé de cet enseignement parce qu’il y voit, le moyen idéal de limiter plusieurs vices, en l’occurrence les grossesses précoces en milieu scolaire. Mais moi, je vois le contraire. Regardez comment les filles s’habillent pour sortir des maisons pour se rendre à l’école ; tout est exposé presque. Selon moi, la lourde tâche revient prioritairement aux parents», pense-t-il.
Les protestants méthodistes approuvent l’approche innovante de l’ESS
Emmanuel Azonhounmon, pasteur à l’Eglise Protestante Méthodiste du Bénin (EPMB), Temple Bethlehem de Tchanhounkpamey, a son avis sur le sujet de l’ESS. « Cette éducation, je ne sais pas si elle est ciblée véritablement à la maternelle ou à partir de la classe de CM2. L’enfant qui est à la maternelle est encore trop jeune comparativement à celui du CM2. Avec ce dernier, cette éducation peut aller à mon avis, mais pas avec les enfants de la maternelle du fait que même en leur parlant d’une telle notion, ils n’y verront pas l’importance, ça ne pourra pas les pénétrer. Je suis favorable pour l’insertion de l’Education à la Santé Sexuelle au niveau des classes ; je la soutiens fortement car les parents, à eux seuls, ne peuvent pas conseiller sur cette matière très vaste et trop sérieuse. D’ailleurs, ils n’ont même pas le temps nécessaire de s’asseoir pour parler de cela avec les enfants, surtout s’agissant des parents fonctionnaires. Et donc, pour moi, c’est bien que les enseignants soient outillés et mandatés pour conduire cet enseignement en symbiose avec les parents qui arrivent partiellement à le faire. L’éducation à la Santé Sexuelle des enfants viendra donc combler un vide. Je pense qu’une telle éducation fera du bien aux enfants, surtout pour les encadrer dans leurs désirs et envies. Les parents dépensent de fortes sommes pour l’éducation des enfants mais parfois, c’est la grossesse prématurée ou précoce qui vient tout saboter et tout foutre en l’air. Un enfant sensibilisé sur sa sexualité est une âme repêchée et isolée des dérives sexuelles. En somme, l’Eduction à la Santé Sexuelle doit être l’une des priorités des éducateurs à l’endroit des enfants ».
ESS : Blaise Coovi Djihouessi lève les appréhensions et calme les sceptiques
Tout se joue avant 6ans, renseignent les connaissances scientifiques en Sciences de l’éducation. D’où le ciblage des apprenants de la maternelle et du primaire pour bénéficier du programme d’ESS. Selon le Directeur de l’INIFRCF, Blaise Coovi Djihouessi, président du Comité technique de mise en œuvre de l’expérimentation de l’ESS, « le but de l’enseignement de l’ESS à la maternelle et au primaire est d’apprendre aux enfants les règles élémentaires d’hygiène corporelle et sexuelle, voire de gestion pertinente et efficace de leur corps ». A l’en croire, les contenus infusés dans les guides d’apprentissage permettront aux enseignants de mieux transmettre l’information aux apprenants par diverses méthodes pédagogiques adaptées à chaque classe et suivant l’âge. Par exemple, dans le cas de la maternelle, l’intervention de l’enseignant vise par exemple à montrer : Quels sont les vêtements qui sont indiqués et qui évoquent la thématique de l’ESS ? Quelles sont les couleurs de tissus qui font apparaître la saleté ? Quelles sont les couleurs qui ne laissent pas transparaître la saleté ? Qu’est-ce que vous devez porter désormais pour qu’on sache que votre vêtement est propre ou pas ? Quelle doit être la qualité de la matière ? « A travers cet enseignement par exemple, les enfants sont à même de dire à leurs parents de ne pas leur acheter des cache-sexes [slips, ndr] en nylon. Il a été démontré scientifiquement que le nylon peut créer des problèmes de santé sexuelle comme la stérilité, car la matière avec laquelle est fait le nylon pose certains problèmes. Nous disons aux enfants de ne pas utiliser des cache-sexes marron, car cela ne montre pas les saletés. Même si les enfants les portent durant une semaine, eux et leurs parents ne percevront pas les saletés. Il faut préférer le blanc, le belge, etc. mais pas le rouge, ni le marron. L’enseignant doit aborder cela car c’est indiqué dans le guide qu’il doit le faire », a-t-il dit pour rassurer les parents sceptiques.
ESS : Former des apprenants responsables et des familles épanouies
Quel type de citoyen veut-on former avec ce programme ? La réponse de Blaise Coovi Djihouessi, Directeur Général de l’Institut National de l’Ingénierie de Formation et de Renforcement de Capacités des Formateurs (INIFRCF), est claire : « Nous voulons un citoyen bien formé dans l’estime de soi. Quand vous avez l’estime de soi, vous ne faites pas n’importe quoi avec votre corps, ni avec celui des autres. Si vous avez l’estime de vous-même, vous n’allez pas violer une gamine, ni vous retrouver dans des situations très peu honorables. L’estime de soi vous conduit vers des comportements vertueux ». Il ajoute, par ailleurs : « … nous n’interdisons pas aux jeunes d’aller vers le sexe, nous ne les y autorisons pas non plus, mais nous voulons plutôt qu’ils aient une sexualité responsable. Les informations que nous portons aux apprenants et aux apprenantes sont susceptibles de les emmener à apprécier tout ce qui se dit et se fait à la radio, à la télévision et en dehors de l’école ». Au-delà des apprenants, la directrice de la Famille, de l’Enfance et de l’Adolescence, Solange Odjo Ahlonsou, voit le bien-être de la famille à travers le programme d’Education à la Santé Sexuelle (ESS). Rencontrée dans son bureau, elle renseigne : « Nous mettons ces mesures en place pour éviter tout ce qui pourrait perturber le bien-être et l’avenir de chaque fille et garçon, et par ricochet la stabilité de la famille. Nous voulons que les enfants aient un avenir meilleur et qu’ils soient responsables de leurs choix. Nous voulons la cohésion au niveau de la famille. Que les enfants deviennent des personnalités qui contribuent au développement de ce pays ».
Nécessité de prendre en charge les parents sur l’Education à la Santé sexuelle
Malgré les bonnes intentions du programme d’ESS, la société béninoise est déjà confrontée à une dépravation des mœurs. Pour restaurer les valeurs, la DFEA Solange Odjo met les bouchées doubles depuis le lancement du Guide de référence pour la conduite du dialogue parent-enfant en santé sexuelle et reproductive. Il s’agit surtout de la conduite d’actions pour un soutien psychologique et psychique des populations. Selon la directrice, cette situation est aussi le fait du manque d’informations chez les parents. « Cette situation est aussi due au fait que de nombreux parents ne savent pas quoi dire aux enfants parce que, eux-mêmes, n’ont pas été préparés à leur époque. Nous nous sommes donnés pour tâche d’aller outiller les parents sur la question afin qu’ils puissent mieux répondre aux besoins de la jeunesse aujourd’hui », a expliqué Solange Odjo. Elle n’a pas occulté les réseaux sociaux et les outils technologiques qu’elle n’a pas hésité à pointer du doigt comme aussi l’une des sources de cette dépravation des mœurs avec la complicité des parents. « C’est parce que les parents n’ont pas ces informations que les enfants s’occupent à travers les Smartphones, les feuilletons, les réseaux sociaux. Nous irons à leur rencontre pour que ce dialogue intergénérationnel en terme de respect, de comportement et de promotion des valeurs morales et sociales soit restauré ». Cela dit, un autre aspect est aussi à incriminer, selon Blaise Coovi Djihouessi : les préjugés.
L’Education à la Santé Sexuelle pour sauter les barrières des préjugés
«L’objectif visé à travers l’innovation qu’est l’introduction à la santé sexuelle dans le programme en particulier est de pouvoir faire de nos apprenants des individus épanouis, respectueux de leurs corps et posant des actes en tenant compte des conséquences de ces actes-là. Pour faire simple, nous attendons de ces apprenants, des individus socialement responsables, intellectuellement responsables qui sortent de leur parcours scolaire en ayant eu le cheminement adéquat, mais surtout en ne grandissant pas avec des préjugés ou des informations fausses ». Ainsi s’est exprimée Christelle Maillard, Présidente de l’ONG APESSA (Association Pour l’Education, la Sexualité et la Santé en Afrique) pour renseigner sur le genre de citoyen que les acteurs du système éducatif entendent former en instaurant le concept de l’ESS dans les curricula de formation de la maternelle au secondaire, en passant par le primaire. Pour la responsable de l’ONG APESSA, l’un des points focaux de ce programme, il est important qu’on définisse aux apprenants leur environnement tout en donnant des informations tant sur leur santé sexuelle, leur vie sociale et sur l’aspect mental. Pour la phase pilote, le plan de suivi se veut inclusif et part de l’enseignant aux parents d’élèves. « Le plan de suivi de l’ESS est purement objectif, académique. Nous avons défini aujourd’hui un cadre formel qui invite les enseignants à jouer leur rôle d’éducateur. Donc l’enseignant va donner à l’apprenant une information qui peut être satisfaisante ou incomplète, après il y a les ONGs qui interviennent déjà dans les écoles ou dans la communauté sur la thématique. Ensuite, il y a la communauté, c’est-à-dire les médias et enfin les parents qui viennent en dernière position alors qu’ils étaient en réalité supposés être le point de départ », a recadré Christelle Maillard.
Faire de l’éducation des apprenants et parents à l’ESS une priorité
«La méthode est non seulement la formation des parents, mais aussi des enfants. Si nous faisons la formation des enfants et que nous ne tenons pas compte des parents, cela ne servira à rien ». Voilà la méthode que Gildas Ayité Glonou, assistant social et jeune leader sur le programme JND de la fondation Friedrich Herbert près le Bénin, prône et qui est d’ailleurs en cours pour repêcher les apprenants au seuil d’une vie de débauche. Pour lui, l’enfant qui revient de l’école après avoir reçu un cours sur l’éducation sexuelle pourra solliciter l’aide de ses parents qui sont déjà formés. Dans ces conditions, soutient-il, le parent sera à même d’expliquer à l’enfant le cours du jour et partager avec celui-ci ses expériences et connaissances. « La finalité, c’est que l’apprenant soit en mesure de maîtriser son corps. L’apprenant qui a déjà un enfant ne pourra pas savoir comment maîtriser son corps à 100%. Je pense que tout individu, tout citoyen devrait avoir de telles informations pour non seulement son bien être personnel, mais aussi celui de la société », a-t-il dit, martelant que chacun doit faire de l’Education à la Santé Sexuelle en République du Bénin, une priorité qui doit tenir compte du guide sur le dialogue parents-enfants.
Blaise Coovi Djihouessi sur la partition des chefs religieux à l’ESS : « … S’ils n’étaient pas là, nous pourrions commettre des erreurs »
Dans ce long processus de mise en place et d’implémentation de l’Education à la Santé Sexuelle, figurent en bonne place les chefs et responsables religieux et traditionnels. Ils ont activement contribué à la définition des contenus d’enseignement et de la rétention de l’approche éducative. Dans ce dernier extrait de son interview qui boucle la série de dossiers, Blaise Coovi Djihouessi, Directeur Général de l’INIFRCF, revient sur la contribution de ces garants et dignitaires religieux ainsi que le rôle des Ongs dans le même dispositif d’instruction sur l’ESS.
Educ’Action : Quelle est la contribution des autorités religieuses ?
Blaise Coovi Djihouessi : Ce sont nos partenaires et nous sommes très attentifs à ce qu’ils nous apportent comme contributions. Ceux que j’ai à l’esprit sont : l’Imam de la mosquée de Ouando (Porto-Novo), le directeur national de l’enseignement catholique, un dignitaire des religions endogènes. L’apport de chacun a permis au programme de ne pas connaître de résistances au Bénin. Parce que nous ne les invitons pas pour les convaincre, mais nous les invitons pour qu’ils puissent nous orienter. En séance, il y a des débats qui se mènent sur les choix à opérer.
Comment avez-vous apprécier la sortie de l’Église Catholique du Bénin ?
L’Église Catholique, les fidèles musulmans et ceux des religions endogènes ont tous contribué à l’orientation de cette initiative. Ils ont tous participé aux choix terminologiques parce qu’au début, c’était ‘’l’Education Sexuelle Intégrée’’. Nous avons compris très tôt que le terme d’Education Sexuelle pouvait porter à confusion. En effet, quand on parle d’Education Sexuelle, il y a la sexualisation qui porte sur notre façon d’utiliser notre sexualité. Est-ce qu’on veut apprendre aux apprenants à utiliser leur sexualité de telle ou telle façon ? NON! Et ainsi de suite. C’est de commun accord avec les responsables religieux et les garants de la tradition que nous avons opté pour la dénomination Education à la Santé Sexuelle (ESS). Toutes les dispositions ont été prises pour éviter d’éventuels dérapages et pour éviter des représentations tendancieuses des activités que nous menons.
Quelle est votre appréciation de la participation des leaders religieux et traditionnels ?
Je peux dire que s’ils n’étaient pas là, nous pourrions commettre des erreurs. Leur participation nous a emmené à éviter certaines erreurs. Ils participent tous à nos ateliers et interviennent lors des débats où c’est le consensus qui domine. Nous ne votons pas parce que le vote, dans ce contexte-là, peut nous poser un certain nombre de problèmes. Ce n’est pas la voix de la majorité qui l’emporte, c’est le poids de l’argumentaire. Quand l’argumentaire est bien fondé et se justifie, même si c’est une seule personne qui a un point de vue différent de celui des autres, il a alors raison de la majorité.
Quel retour avez-vous de la part des parents ?
La plupart des parents sont satisfaits. Ils voudraient même qu’on les forme pour qu’ils puissent nous accompagner dans le processus.
Quelles relations entretenez-vous avec les ONGs du secteur ?
Nous travaillons avec certaines ONGs. Mais nous avons aussi un document qui a été édité pour définir les conditions d’intervention des ONGs sur la thématique de l’Education à la Santé Sexuelle. Avant d’intervenir dans un établissement, toute ONG doit avoir une autorisation. Il nous est parvenu que certaines ONGs distribuent des préservatifs aux enfants dans les écoles. Il y a même un parent qui a découvert des préservatifs dans le sac de sa fille de 12 ans. Quand il a demandé leur origine à sa fille, cette dernière a dit que cela leur a été distribué à l’école. J’ai été obligé d’intervenir sur une chaîne de radio pour montrer que cette ONG a agi sans autorisation. Le ministre a instruit les directeurs départementaux pour qu’ils veillent à ce que les ONGs présentent le dossier qui les autorisent à aborder cette thématique avant d’intervenir dans les écoles. Leur intervention peut en effet, perturber le travail scientifique qui est fait. Bientôt, nous aurons une séance de cadrage avec ces ONGs pour que les parents n’aient pas une mauvaise représentation de cette initiative parce qu’une ONG aurait abordé avec maladresse la thématique de l’Education à la Santé Sexuelle (ESS).
Réalisé par la Rédaction de Educ’Action