Performances des candidats au BEPC de 2018 à 2020 : Le Bénin amorphe avec de réelles difficultés en littérature - Journal Educ'Action - Éducation au Bénin et dans le monde
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Performances des candidats au BEPC de 2018 à 2020 : Le Bénin amorphe avec de réelles difficultés en littérature

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De 2018 à 2020, les résultats aux examens du BEPC ont connu de nombreuses fortunes avec un quasi équilibre entre 2019 et 2020 sur le plan national. Mais c’est l’arbre qui cache la forêt. Educ’Action revient sur les résultats de ces trois dernières années 2018, 2019 et 2020 pour tirer les grandes tendances des chiffres afin de vous fournir une visibilité globale des performances des apprenants et par ricochet des enseignants.

De 2018 à 2020, le Bénin a évolué en dents de scie. 28,63% en 2018, 56,72% en 2019 et 51,19% en 2020. Même si ces chiffres sont peu évocateurs, ceux produits par les départements en disent long sur leurs performances. Ainsi, quatre (04) départements (Collines, Couffo, Mono et Zou) ont gardé une progression constante avec une évolution de leurs performances sur les trois années. Les autres départements ont gardé le rythme des résultats nationaux.
Le bouc émissaire qu’on pourrait pointer du doigt pour expliquer cette contre-performance est la Covid-19. Cependant, une analyse plus pointue invite à jeter un regard du côté des résultats par série.

Série scientifique, le cap est maintenu

Malgré la Covid-19, la série Moderne Court (MC) reste de marbre en deux ans sur le plan national, avec même une légère progression. Ne disposant pas des données par série de 2018, le traitement des chiffres statistiques a porté sur les années 2019 et 2020. La première observation qui se dégage est que la grande majorité des départements a fait une progression en deux ans. Les plus illustres sont le Mono (+31,81%), les Collines (+22,69%), le Couffo (+19,78%), le Zou (+ 19,66%) et l’Alibori (+15,05%). Sur les deux années, le trio de tête est gardé par le Littoral, suivi de l’Atlantique et du Borgou. Cependant, les performances de ce dernier méritent une interrogation. Les performances du Borgou sont passées de 64,14% à 47,51%, soit une baisse de rendement de 16,63%. Comme le Borgou, les regards doivent aussi se tourner vers l’Atacora passé de 60,70% à 49,59%.
La Covid-19 semble ne pas avoir handicapé les résultats de cette série. De la série MC, passons à la série littéraire, Moderne Long.

Série littéraire, la chute

La contre-performance du Bénin au BEPC s’enregistre au niveau de la série Moderne Long (ML), appelée série littéraire. Sur le plan national, le Bénin est passé de 64,26% à 44,20% soit une régression de 20,06%. Les matières dominantes dans cette série sont le Français, l’Anglais, l’Allemand et l’Espagnol. En deux années, les promotions des apprenants des classes de 3ième sont passées du meilleur au pire. Tous les départements ont connu une baisse de rendement. Une fois de plus, le département du Mono garde la flamme allumée avec un léger bond de 3,43% pendant que les autres se battent comme le diable dans un bénitier. La palme de la contre-performance revient au département du Plateau avec un rendement de – 40,94%. Ensuite le Borgou (- 34,75%), l’Atacora (- 31,23%), l’Ouémé (- 31,06%), l’Atlantique (- 20,66%), la Donga (- 19,33%), le Littoral (- 18,88%), l’Alibori (- 11,72%), le Zou (- 9,67%), le Couffo (- 6,9%) et les Collines (- 4,41%). Au-delà de ces chiffres, de réelles questions se posent sur l’encadrement des apprenants dans cette série.
Comment comprendre que dans le même contexte de la Covid-19, la série scientifique ait enregistré de bons résultats tandis que la série littéraire est rentrée droit dans le mur.

De la qualité des épreuves de langues

On pourrait d’abord interroger les épreuves. Qu’il vous souvienne que ces dernières années et même cette année, des bruits ont couru sur la qualité des épreuves du BEPC, notamment celle de mathématiques. Ce qui avait incité Educ’Action à conduire un dossier sur les erreurs commises dans la composition des épreuves. Mais, il s’agit de mathématiques, une matière scientifique et non d’une matière littéraire.
D’aucuns pourraient se demander aussi si les apprenants n’auraient pas été évalués dans des chapitres qu’ils n’ont pas abordés en classe ? Cette hypothèse pourrait tenir la route. Mais alors, comment comprendre que le Mono ait un rendement positif et, plus généralement, comment comprendre cette variabilité des rendements ?

 

Autre point de réflexion, les enseignants

Toujours à la quête de l’information, Educ’Action a conduit un dossier publié en deux parutions sur les 30 ans de la Conférence Nationale des Forces Vives dans le mois de février dernier. Il en est ressorti que la formation des enseignants au Bénin a toujours été un véritable défi. Au fil des années, les besoins n’ont jamais été comblés. Pour relever ce défi au cours cette année scolaire, le Gouvernement a procédé au recrutement des enseignants auxquels on a donné le titre d’aspirants. Leur recrutement s’est fait dans toutes les matières et séries sur la base de leurs diplômes, tant académiques que professionnels, à partir d’une base de données constituée à cet effet. Alors, il y a-t-il eu une faille dans le recrutement des enseignants des disciplines littéraires au point d’avoir laissé passer des enseignants incompétents ?
Autre niveau de responsabilité, le corps d’encadrement. Selon l’un des directeurs départementaux de l’enseignement secondaire, le corps d’encadrement s’est beaucoup activé cette année scolaire pour suivre et encadrer les enseignants aspirants en position de classe. Il est donc opportun d’évaluer ce qui a été fait par ces inspecteurs et conseillers pédagogiques, notamment durant la phase de préparation active des examens. Mieux, le Ministère des Enseignements Secondaire, Technique et de la Formation Professionnelle (MESTFP) a créé des postes d’Inspecteurs Pédagogiques Délégués (IPD) dans chaque département. Il s’agit d’une équipe d’inspecteurs qui travaillent en pool. Après trois ans voire quatre ans d’actions, une évaluation de ce dispositif aussi s’impose.

Dictée et goût de la lecture, deux activités intellectuelles à développer

Ce résultat est certainement l’une des conséquences de l’abandon de la dictée à l’école et de la lecture par les apprenants. Pourtant, la maîtrise du Français est la base inconditionnelle nécessaire à la compréhension des autres disciplines et langues.
Même si les aléas naturels ont toujours des impacts sur les activités pédagogiques, il serait difficile de pointer du doigt les contingences naturelles vu qu’une série a été affectée plus que l’autre. La nature ne fait pas de choix entre les séries. Cela dit, il serait opportun de jeter un regard sur le contenu des apprentissages. Dans un contexte aussi exceptionnel que celui de la Covid-19, il est nécessaire de savoir faire la synthèse de l’essentiel des apprentissages afin d’en extraire la substantifique moelle. Mais les contenus dans ces disciplines littéraires sont volumineux. Il serait alors temps de les revoir.
Dernière chose, la nation doit aller à l’école du Mono. Comme l’indiquent les tableaux, c’est le seul département à être resté constant dans ses résultats, à tout point de vue.

Adjéi KPONON

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