Après l’évaluation internationale de 2014 et les nombreuses évaluations nationales, l’édition 2019 de l’évaluation PASEC se distingue par la prise en compte des enseignants dans les quatorze pays participants. Cette innovation a permis de peindre le visage de la performance des enseignants en mathématiques et en langue d’enseignement. La synthèse des résultats se trouve dans le résumé exécutif du PASEC 2019 sur la qualité du système éducatif béninois.
Sur toute l’étendue du territoire du Bénin, 1 136 enseignants ont été testés et enquêtés dans le cadre de cette évaluation pour le compte du Programme d’Analyse des Systèmes Educatifs de la Confemen (PASEC). La collecte des données a concerné aussi bien les établissements publics que privés. Chaque enseignant a été soumis à un questionnaire sur ses caractéristiques individuelles, son expérience professionnelle et son statut, les caractéristiques de sa classe, des informations sur son enseignement, sa collaboration pédagogique et ses conditions de travail. Les enseignants ont été testés sur les contenus enseignés en compréhension de l’écrit, en mathématiques et en didactique des deux disciplines.
Les enseignants excellents en compréhension de l’écrit
Sur une échelle de trois niveaux, la grande majorité des enseignants béninois sont au-dessus du seuil de compétence en compréhension de l’écrit. En effet, 98,3% d’entre eux ont passé les tests avec brio en cumulant, pour le niveau 2, entre 394 et 497 points, et, pour le niveau 3, plus de 497 points. Estimés à 22,7%, les enseignants du niveau 2 ont diverses compétences dont la capacité à utiliser des informations paraphrasées. Ceux du niveau supérieur, le niveau 3, sont estimés à 75,6%. A ce niveau, entre autres compétences, les enseignants peuvent tenir compte du contenu d’un texte pour formuler une idée nouvelle pertinente en lien avec les informations lues. Par contre, seul 1,7 % des enseignants sont en-dessous du seuil de compétences. Le tableau ci-dessous est plus illustratif de la situation.
Les performances dans chaque département ont aussi été évoquées. Le premier constat est qu’aucun des départements n’est sous le niveau 1. Concernant ce niveau 1 proprement dit, les performances varient de 0,3% (Donga et Plateau) à 3,5% (Borgou). La grande majorité des enseignants dans les différents départements ont atteint le niveau supérieur, niveau 3. Les départements les plus performants à ce niveau étant le Mono (87,2%) et le Littoral (86,8%). Les détails sont dans le tableau ci-dessous.
En mathématiques, certains préfèrent les nombres aux figures
En mathématiques, les enseignants béninois ont aussi eu de très bons scores. En effet, ils sont 88,3% à être au-dessus du seuil de compétences et 10,9% en dessous du seuil de compétences. Plus particulièrement, 60,5% d’entre eux ont atteint le niveau supérieur du seuil de compétences (niveau 3) et 27,8% sont au niveau 2. Juste en dessous du seuil de compétences, au niveau 1, on trouve 9,3% des enseignants. Selon le rapport, leurs compétences se situent essentiellement dans le domaine des nombres (par exemple la connaissance de l’écriture décimale, la comparaison de fractions, la notion de pourcentage…) et des opérations (capacités à résoudre des opérations impliquant des nombres entiers, des nombres décimaux et des fractions). Pour ces enseignants, en-dessous du seuil de compétences, au niveau 1, les experts conseillent de leur accorder une attention particulière et des actions de formation spécifiques pour renforcer leurs connaissances et compétences. L’ensemble des compétences est mieux détaillé dans le tableau ci-après.
Au niveau des performances dans chacun des douze départements du Bénin, le rapport fait observer que plus de 65% d’enseignants testés appartiennent au niveau 3 de l’échelle en compréhension de l’écrit. Cependant, le département du Borgou (48.4%) est le seul à avoir moins de 50% d’enseignants enquêtés appartenant au niveau 3 de l’échelle des compétences en mathématiques. Pour l’ensemble des douze départements, au niveau 2 de l’échelle , il est observé une proportion non négligeable d’enseignants. En effet, stipule le résumé exécutif du PASEC 2019 pour le Bénin, pendant que la moyenne des douze départements est de 28,7%, la proportion varie entre 14,6%, dans le Mono, et 38,2%, dans le Plateau. En ce qui concerne le niveau 1 de l’échelle, les plus fortes proportions sont observées dans les départements du Borgou (18,6%) et de l’Alibori (15,7%). Les départements du Plateau et du Couffo se démarquent avec plus de 94 % d’enseignants au-dessus du seuil de compétences. Les détails sont dans le tableau qui suit.
Le Mono, le Couffo et le Littoral, plus performants en didactique
La didactique est constituée par l’ensemble des procédés, méthodes et techniques qui ont pour but l’enseignement de connaissances déterminées.
Pour cette évaluation 2019 du PASEC, dans les deux disciplines, il a été question de mesurer les capacités des enseignants à quatre niveaux : analyser leurs démarches pédagogiques; choisir des situations adaptées aux objectifs d’apprentissage; repérer les erreurs courantes et, enfin, en identifier les sources de façon à pouvoir aider les élèves à progresser.
Plus spécifiquement, concernant les compétences en didactique de compréhension de l’écrit, les enseignants enquêtés ont obtenu un score qui met en exergue un bon niveau de connaissance et de maîtrise de la didactique de la compréhension de l’écrit, selon le rapport. Le principal hic se trouve au niveau du Borgou qui mérite une attention particulière en raison de l’écart entre son score et la moyenne nationale, soit 509,8 contre 536,2, précise le rapport.
Au niveau de la didactique des mathématiques, globalement, le niveau de connaissances des enseignants (551,7) est moins affirmé que dans les contenus disciplinaires en mathématiques (571). L’analyse par département affiche trois départements en tête de liste, à savoir le Mono (576,9), le Couffo (575,1) et le Littoral (574,5), évoque le rapport. Cependant, les départements du Borgou, de l’Atacora, de l’Atlantique et de la Donga se positionnent en fin de liste, avec des scores moyens respectivement de 517,9, 521,8, 544,8 et 545,8. Le tableau ci-dessous revient sur les détails.
Au-delà des aspects disciplinaires, l’évaluation s’est aussi penchée sur différents aspects de la fonction enseignante.
Zoom sur la qualité du travail des enseignants
Il faut d’entrée de jeu souligner que la proportion des hommes est de 72,1% contre 27,9% pour les femmes. Ce qui signifie que les enseignants de sexe féminin sont sous représentés au niveau national et dans tous les départements. Le rapport fait aussi observer que les scores obtenus par les enseignants hommes sont significativement plus élevés que ceux des femmes, en particulier en mathématiques au niveau national et dans la plupart des départements. En compréhension de l’écrit, c’est dans les départements de l’Alibori, du Mono et du Plateau que les performances des hommes sont plus élevées.
L’ancienneté de l’enseignant a aussi son importance. En effet, plus l’ancienneté de l’enseignant est élevée, mieux il performe en compréhension de l’écrit, en mathématiques et en didactiques des deux disciplines, indique le rapport. Comme l’ancienneté, le niveau académique élevé impacte positivement les performances des enseignants, selon les résultats de l’évaluation PASEC 2019.
En mathématiques, l’évaluation s’est penchée sur les domaines d’enseignement auxquels l’enseignant accorde le plus d’importance en classe. Les mesures ont révélé que, sur le plan national, 08 enseignants sur 10 accordent plus de temps d’apprentissage au domaine de la numérotation et des opérations au détriment des autres domaines à savoir : (i) la géométrie et le repérage dans l’espace (11,8%) et la mesure (5,3%). Pour entrer dans les détails, dans le Zou en particulier, les données collectées ont révélé que les enseignants n’accordent pas de temps d’apprentissage à la géométrie et au repérage dans l’espace (0,0%). L’analyse de ces données fait ressortir des préoccupations entre autres relatives : (i) à la maîtrise effective des contenus disciplinaires dans les domaines de la géométrie, du repérage dans l’espace et de la mesure par les enseignants ; (ii) au respect ou non des quotas horaires fixés dans les emplois du temps pour l’apprentissage dans ces domaines et (iii) aux difficultés des apprenants à assimiler les contenus notionnels liés auxdits domaines.
Même si les séminaires et journées pédagogiques impactent positivement le travail des enseignants, seulement 21,5% des enseignants sont absents pour des raisons de séminaires et de journées pédagogiques, note le résumé exécutif de l’évaluation PASEC 2019 au Bénin. Ainsi, font observer les experts, tout porte à croire que la plupart des enseignants (78,5%) ne s’intéressent pas à ces rencontres pourtant utiles pour le renforcement de leurs capacités.
Les différences de performance entre les enseignants inspectés et ceux qui ne l’ont pas été ne sont pas significatives, révèle le rapport. Les enseignants inspectés devraient avoir de meilleures performances aux tests sur les contenus disciplinaires et sur la didactique de lecture et de mathématiques. En revanche, en considérant les départements du Mono et du Plateau, il apparaît que les enseignants inspectés ont obtenu des scores significativement inférieurs à ceux des enseignants non inspectés. La perception des enseignants a aussi été abordée sur divers aspects de leur travail.
Le point de vue des enseignants sur leurs conditions de travail
Les enseignants ont aussi porté un regard sur les autres facettes de leur travail. D’entrée de jeu, ils ont une perception globalement satisfaisante de la qualité des bâtiments de l’école, de la disponibilité des fournitures scolaires, de la qualité des programmes, de leurs relations avec leurs collègues et la communauté, de la gestion de l’école. Comme l’indique le rapport, moins de 15% des enseignants enquêtés ont déclaré avoir été victimes de harcèlement moral et seulement 1,4%, victimes de harcèlement sexuel. Sur ce plan, l’analyse de l’influence du harcèlement moral sur les performances des enseignants en lecture et en mathématiques a montré un écart de performance significatif en faveur des enseignants non victimes du harcèlement moral, dans le Littoral dans les deux disciplines, et dans l’Alibori, en lecture.
La performance des enseignants au regard du niveau de salaire a aussi été traitée. Le rapport signale que, malgré les mesures prises par les gouvernements successifs pour améliorer le niveau salarial des enseignants, 25,3% des enquêtés au niveau national ont une mauvaise appréciation du niveau de leurs salaires. Les départements des Collines (34,8%), du Zou (31,8%), du Plateau (31,7%) et de l’Atlantique (30,4%) ont enregistré les plus fortes proportions d’enseignants ayant eu cette mauvaise appréciation. Les écarts de performances entre les enseignants ayant une bonne perception du niveau de salaire et ceux qui en ont une mauvaise perception sont significatifs au niveau national et dans la plupart des départements particulièrement en didactique de mathématiques.
Au niveau national, 46,0% des enquêtés ont une mauvaise appréciation des opportunités de promotion. Cette perception varie selon les départements entre 29,7 % dans le Littoral et 55,2% dans l’Alibori. Au plan national, dans les disciplines de l’évaluation, les enseignants ayant une bonne appréciation des opportunités de formation ont présenté des scores significativement inférieurs à ceux qui ont une mauvaise appréciation des opportunités de formation, représentent 24,3% des enseignants enquêtés.
La prochaine parution va se pencher sur l’environnement scolaire au Bénin.
La Rédaction