Les grands hommes meurent aussi ? - Journal Educ'Action - Éducation au Bénin et dans le monde

Les grands hommes meurent aussi ?

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Il y a deux événements qui m’ont marqué toute ma vie et dont je me souviens encore : le premier, c’est celui où j’ai découvert, moi garçon en classe de CM2, que les maîtresses et les maîtres mangeaient aussi. 01Ah bon ! Comme nous? Cela signifie que nous partageons quelque chose ! Plus tard, lorsque j’ai vécu dans ce pays francophone, limitrophe du nôtre, le timonier national passait en trombe dans un cortège de plusieurs voitures noires aux vitres opaques pendant que nous, le peuple, dos tourné, nous applaudissions. Il semblait que souvent, il n’était même pas dans une des voitures. Un jour, on annonça la mort de cet immense homme d’Etat et jusqu’à ici, je n’y crois pas ; car des personnages de ce genre ayant tout pouvoir sur ce qui respire ou même soupire, ne pouvaient pas mourir.
C’est donc plein d’incrédulité que me parvint l’annonce de la mort d’un autre homme d’Etat dont le prénom Céphas qu’il partageait avec le premier des disciples de Jésus ayant bâti son église, gageait de son immortalité. Ces grands hommes qui décidaient de nos vies et de notre mort ; qui pouvaient nous affamer sans coup férir pendant qu’ils construisaient des édifices à leur gloire tout en balisant les routes vers nos cimetières pouvaient-ils se courber et se faire humilier ?
Comment comprendre ces hommes qui laissent des pages illisibles dans l’histoire ? Font-ils exprès ou sont-ils piégés par les circonstances lorsqu’ils se rendent compte que le peuple qu’ils souhaitaient diriger et défendre était ondoyant, divers, versatile et n’obéissait qu’au bâton et à la carotte !
Un problème apparemment insoluble se pose à nous à savoir : l’immortalité du pouvoir. Comment nous, êtres mortels, quels que soient nos rangs et positions, pouvions nous passer à la postérité ? On pourra me dire que Kubilaï ou Gengis Kahn, Hitler et Staline sont rentrés dans cette postérité et pourtant, ils étaient plus que sanguinaires ! Mais moi, je vous citerai Gandhi, Martin Luther King ou Mandela qui continuent de rayonner et d’inspirer.
Chaque jour, l’univers des médias et les différentes déviances et pathologies qu’ils font naître, influencent des individus qui occasionnent des fusillades, détruisent, pillent, volent et violent au nom de certaines idéologies individuelles, sociales ou religieuses ! Nous savons tous aujourd’hui que leurs esprits malades sont téléguidés. On en déduit que pour diriger un pays, un peuple ou une nation, il faut surtout se garder d’être un esprit, voire un corps tourmenté avide d’expériences inavouables et inavouées et de vengeances. Il faut un être équilibré, mû par le désir de bien faire et ayant les qualités intellectuelles et morales requises.
Je sais que je rêve en cherchant un idéal. Mais qui peut me contredire en soutenant que cet idéal ne s’est pas retrouvé dans les hommes comme Gandhi ou Mandela que j’ai cités plus haut. Ils sont partis d’une certaine vision de la vie et de la société qu’ils ont cherchée et réussi coûte que coûte à défendre et expérimenter. Il est vrai que beaucoup de ceux qui accèdent au pouvoir ne veulent surtout pas connaitre ni les longs chemins de croix, ni les circonstances difficiles, voire tragiques de ces vies. Et pourtant, je soutiens que la plupart sont animés de grandes intentions en arrivant au pouvoir.
Pour réussir, en même temps que nous sommes sains de corps et d’esprit; malgré nos nécessaires qualités et défauts, il faudrait toujours interroger deux choses : notre peuple et notre histoire. Je suis d’accord : il faut des révolutions pour faire l’histoire contemporaine car, toute révolution est une rupture épistémologique qui enracine de nouvelles visions, mais jamais ni contre, ni au détriment du peuple. On peut faire des omelettes et casser des œufs, mais il est interdit de tuer les poules autant que les coqs !
Notre histoire montre à souhait, n’en déplaise à cette intelligentsia inutile et bavarde que les blancs ont formaté pour les servir, que nous avions eu des civilisations brillantes qui ont façonné les peuples autant à l’occident, à l’orient et partout ailleurs. Il s’agit de s’inspirer de cette grandeur d’antan, pacifique, plein de bons sens et de trésors.
En définitive, tout homme d’Etat entre dans l’histoire et y reste en servant le peuple et son bien-être et jamais en se servant du peuple car, alors il ne s’occupe que de ses complexes, de ses manies et de ses mégalomanies préjudiciables. Le pouvoir est fait pour servir; il est passager. Et tandis qu’il élève dans ce service, il immortalise celui qui a bien servi juste pour un moment passager.

Maoudi Comlanvi JOHNSON, Planificateur de l’Education, Sociologue, Philosophe

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