En tant que professeur de philosophie, s’il y a un cours que j’avais du plaisir à dispenser, c’est celui sur les régimes politiques et notamment, la partie sur la démocratie. Je passais d’abord par les théories totalitaires comme les différentes dictatures (monarchie, l’oligarchie …) pour échouer, avec délectation, sur ce qui faisait mon plaisir absolu : la démocratie définie comme le pouvoir du peuple, pour le peuple et par le peuple.
Il y a un sujet qui, par-delà tout, m’inspirait et s’intitulait : « Peut-on se passer de la démocratie ? » Quand je le proposais à mes élèves, j’attendais la correction avec impatience pour leur asséner l’une des rares certitudes de ma vie : On ne peut pas se passer de la démocratie, car c’est par ce canal que le peuple exprime son pouvoir.
Avec le recul, j’ai commencé par m’interroger et ensuite, très lentement et surement, à être totalement convaincu que la démocratie, telle qu’elle se présente à nous, aujourd’hui, est la plus grande arnaque depuis quelques siècles. On nous a pris en otage à partir d’un principe évident qui est devenu aujourd’hui une idéologie rentable.
Et, pourtant, nous avions reçu, à travers l’histoire, plusieurs avertissements : le peuple grec a pratiqué et expérimenté ce régime et ensuite l’a abandonné, puis Thomas Hobbes l’a tout le temps martelé : « L’Homme est un loup pour l’Homme » et par conséquent, il parvient toujours à asservir son prochain quel que soit le moyen et l’idéologie qu’il met en place.
L’idéologie de la démocratie (car, maintenant, c’est juste une idéologie !) est aujourd’hui complètement ancrée dans nos mœurs. Il y a des pays phares qui en sont des exemples absolus. Et pourtant, ces pays sont aujourd’hui les plus totalitaires, consciemment ou inconsciemment. Ils ne supportent pas la contradiction et nous imposent l’un des mécanismes de destruction le plus abominable : le droit ou le devoir d’ingérence ! Au nom de ce principe de démocratie colorée, on conquiert les nouvelles terres, les nouvelles richesses minières, le pétrole, etc. On en arrive à la seule valeur qu’ils prônent en réalité à savoir l’intérêt matériel ou si vous préférez l’argent. Le seul auteur qu’ils ont le plus lu et qu’ils vénèrent, c’est Karl Marx ! Et pourtant, ils ne vous l’avoueront jamais.
On nous dit que la démocratie prône d’autres valeurs qui procèdent des valeurs essentielles qui doivent guider l’homme : le bon, le bien, l’amour que nous traduisons par la bonne gouvernance, par exemple. Mais avec quoi faisons-nous campagne et récoltons-nous des voix ? N’allez pas chercher trop loin : l’argent ! Seul l’argent aujourd’hui est et a une valeur.
Transposons ce que nous disons à notre pays et à son éducation. Nous sommes l’otage de plusieurs situations. Nous en citerons deux : notre classe politique et nos syndicats. Dans le premier cas, les élections passées et présentes (et même à venir) ont montré le pouvoir omniprésent de l’argent de telle façon que les gouvernants, lorsqu’ils arrivent au pouvoir, sont obligés de satisfaire, de remercier ceux qui les ont amenés au pouvoir. L’exemple type a été l’ancien régime où on partageait à tous ceux qui sont supposés avoir œuvré pour l’accession des postes qui pouvaient rapporter. La conséquence de cette situation, c’est qu’on a mis en place un pays où la fracture sociale est immense : des gens immensément riches qui ont formé une jeunesse inculte et avide qui est allée à l’école de l’argent facile, de la délation et de l’achat des diplômes dans la sous-région.
Mais attention ! Ne croyez pas que ceci est l’apanage de l’ancien régime seulement. Les nouveaux dirigeants méditent. Ils n’ont pas encore trouvé la solution même si le leader a compris que la première solution, c’est un mandat unique où il s’agira d’oser entreprendre les reformes. Pourtant, les premières nominations dans les plus grands postes ressemblent à des remerciements. On ne peut sûrement pas y couper, le temps de revenir aux principes de compétences grâce à l’appel à candidatures. La classe politique, sûre de sa force, nous prend donc en otage et fait main basse sur une démocratie dictée par nos députés à l’Assemblée qui refusent au peuple toute possibilité de référendum afin d’enfermer à jamais ceux qui ont fait main basse sur notre argent.
L’autre exemple, ce sont nos syndicalistes qui, au nom d’une démocratie que nous avions mise en place, prennent en otage l’éducation, par exemple. Parce que les dirigeants étaient préoccupés à engranger les milliards, ils ont laissé ou œuvré, de façon feutrée, à la mise en place d’un syndicalisme sauvage où actuellement, nous comptons près d’une centaine de ‘’factions syndicales’’ dans le primaire et plus d’une cinquantaine dans le secondaire. Ces syndicalistes, au nom d’une société démocratique, prennent en otage les mutations d’enseignants, les corrections des examens, le temps scolaire et les tickets valeurs. Comment ? Demandez et on vous l’expliquera.
J’en arrive à me demander une chose qui me taraude tout le temps l’esprit : Est-ce une bonne idée d’avoir été honnête ? Est-ce rentable ? Mes poches sont vides et mes enfants n’ont pas fini d’aller à l’école ! Moi, je peux m’en sortir, car j’ai appris un métier où on n’arrête jamais de travailler. Et les autres qui ont cru aux valeurs essentielles de l’honnêteté et de l’amour du prochain ? Méditons ensemble ce passage de la Bible qui dit tout face à nos incertitudes (1 corinthiens, chap.13, verset 1-13) et nous invite à l’amour et au pardon.
Maoudi Comlanvi JOHNSON, Planificateur de l’Education, Sociologue, Philosophe