Le BEAP or not to BEAP ! L’éducation de base en question - Journal Educ'Action - Éducation au Bénin et dans le monde

Le BEAP or not to BEAP ! L’éducation de base en question

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Le Ministre en charge des Enseignements Maternel et Primaire a, devant un parterre d’acteurs de l’éducation sans oublier les PTFs, fait une des déclarations des plus fortes et des plus sensationnelles. Le Bénin se propose d’étendre l’éducation de base jusqu’en classe de Terminale. La nouvelle circulait, se murmurait avec perplexité depuis un certain moment dans le microcosme éducatif et beaucoup se préparaient, étaient même pressés d’écouter et de comprendre l’esprit, sinon les tenants d’une telle décision. C’est pourquoi la convocation d’une session extraordinaire du Groupe Local Education (GLE) a réuni, à la limite le nec plus ultra du système, venu s’enquérir de visu de cette nouvelle vision.
En sa qualité de chef de file des ministres en charge de l’éducation, l’autorité ministérielle a décliné la logique de cette nouvelle vision devant un public étonné et pleins d’appréhensions sur les présupposés et les effets que vont induire une décision aussi importante. On ne peut nier que ce fut l’occasion d’assister à un instant privilégié de l’approche de notre système éducatif. Si le Ministre a souligné que cette décision portait le sceau de la souveraineté béninoise, le technicien de l’éducation, c’est-à-dire le pédagogue, a expliqué et répondu de manière efficace,à défaut d’être quasi convaincant, aux questions, tant le souci des implications désorientait le peuple des sachants.
Les propos de cette chronique ne consistent pas à rendre compte de ce qui s’est passé mais, à juste interpeler sur quelques préalables à la prise en compte de cette nouvelle vision d’un pays souverain. Ce qu’il faut avant tout retenir ici, c’est que le pays, après une analyse dans les hautes instances de décision, suite à plusieurs consultations d’experts, a souhaité imprimer un cap nouveau au système éducatif dans le sens de son amélioration. Ceci appelle un certain nombre de préalables utiles à rappeler et à déblayer avant toute chose.
Tout d’abord, il faudrait faire attention à la notion d’éducation de base qui est une dénomination, sinon une approche consacrée, qui renvoie à un enseignement de 9-10 ans, s’arrêtant au premier cycle du secondaire et considérée comme irréversible. Cette approche, en anglais BEAP (Basic Education Approach Program) a été développée et fortement soutenue par l’UNESCO en référence aux engagements de Dakar (Sénégal) sur l’Education Pour Tous. Elle a été un soubassement du Plan Sectoriel de l’Education (PSE) du Bénin.
Le Pays, voulant à la fois englober et élargir cette approche internationale consacrée, se devrait d’en faire une évaluation de sa mise en œuvre au niveau de son document de planification, identifiant les forces et les faiblesses, d’autant plus que le Ministre a insisté sur un élément essentiel concernant l’Enseignement Technique et la Formation Professionnelle (ETFP), priorité du Gouvernement pour booster l’efficacité externe en produisant beaucoup de cadres techniques moyens prêts à l’emploi. Il s’agit du passage d’une formation d’initiation lorsqu’on s’arrête au BEPC à une formation professionnalisante lorsqu’on pousse jusqu’en Terminale et plus. Il s’agira aussi de convenir d’un concept spécifique au Bénin qui se «libère» de celui de l’éducation de base tout en l’englobant; ce qui mettra peut-être plus à l’aise la communauté éducative.
Ensuite, un autre point d’attention réside dans le fait que la plupart des partenaires se sont déjà inspirés du PSE 2018-2030 pour asseoir leurs activités. Cette nouvelle vision qui, selon le Ministre, vient conforter et élargir le PSE sans le déstructurer, amène à des reprogrammations difficiles, sinon quasi impossibles pour la plupart.
Enfin, un dernier élément incontournable découle de tout ceci à savoir la reprise du PSE 2018-2030 pour le conformer, le redimensionner au regard de cette importante vision. Cela signifie aussi qu’il s’agira de retoucher la fantastique stratégie de l’ETFP, peut-être trop ambitieuse et dont la cohérence avec le PSE a laissé perplexe plus d’un acteur, notamment plusieurs PTFs. Nous nous retrouvons alors à revoir nos documents de planification de l’éducation pendant les prochaines années; les plus optimistes diront jusqu’à la fin de l’année prochaine et les plus pessimistes jusqu’en 2022 au moins.
A présent, je cherche plutôt les réalistes qui vont pousser pour que nous poursuivions malgré tout, contre vents et marées, la mise en œuvre de nos documents actuels de planifications en gardant à l’esprit que toute œuvre humaine est perfectible et que nous serons toujours à l’écoute de ceux qui incarnent la souveraineté nationale et ont pour rôle de promouvoir de nouvelles visions.

Maoudi Comlanvi JOHNSON, Planificateur de l’Education, Sociologue, Philosophe

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