Quelle est la science la plus importante au monde ? la plupart d’entre vous s’empresseront d’évoquer ce qu’on a tôt fait de nommer les sciences exactes qui n’ont d’exactitudes que les errements et les opportunités de ceux qui sont devenus aujourd’hui les grands savants. Que ce soit Newton avec la gravité, Marie Curie et la radioactivité ou encore bien plus tôt Archimède, la science est d’abord la réalisation d’un hasard ! On constate qu’en définitive, qu’elles soient exactes ou humaines, la science est toujours la distorsion, la falsification ou plus simplement l’aboutissement de la véritable et unique discipline qui les conduit, à savoir l’histoire.
Ainsi, toute la philosophie et la science grecques sont nées d’une histoire remodelée et reconquise alors que ceux qui l’avaient faite à savoir les égyptiens sont devenus les promoteurs de ceux qu’on devrait qualifier d’usurpateurs à savoir Thalès et autres Pythagore ! De même, l’Occident a envahi l’Afrique et insisté fortement sur l’inutilité des traditions orales et donc des cultures de ces contrées où on ne peut parler d’histoire ni de science. Et pourtant !
Oui. L’histoire est la science sinon tout simplement le savoir par excellence qui donne sens aux autres. C’est pourquoi ceux qui l’ont compris très tôt, l’ont gardé dans le rôle de « récit des évènements passés ». Elle est, a contrario, la marque du temps et de la vie humaine. Elle a toujours fédéré les autres disciplines et savoirs en les promouvant ou en les décrédibilisant. Comment peut-on connaître la philosophie, les mathématiques, ou la psychologie si la mère de toutes sciences ne nous les révèle pas en expliquant leur source, leur identité de même qu’en établissant leur cohérence et la généalogie des savants qui l’ont fait !
L’histoire n’est donc, ni le récit des évènements passés, ni celui de l’immédiateté mais la marque du temps et de sa connaissance infinie. On comprend pourquoi des historiens modernes comme H. I. MARROU ont défini l’histoire comme « la connaissance du passé ». En même temps, cette définition est encore insuffisante car elle ne rend pas compte de la véritable interaction entre l’entité humaine et l’histoire qui la construit ou la déconstruit ; qui l’aliène ou la promeut ou qui tout simplement la fait.
Ce qu’il s’agit de soutenir ici est évident : l’histoire est donc la mère de toutes les sciences ou plus simplement de toutes les connaissances intellectuelles, morales voire religieuses. Les grandes thèses sur cette science affirment l’interaction très forte entre l’homme et l’histoire dans le sens où on se retrouve quasiment dans cette dialectique de l’œuf et de la poule. Ainsi, Henri MASSIS à la suite de HEGEL, soutenait que « c’est l’homme qui fait l’histoire et non l’histoire qui fait l’homme. Martin Luther KING maintient exactement le contraire en soulignant que « ce n’est pas nous qui faisons l’histoire. C’est l’histoire qui nous fait ». Il faudrait plutôt écouter la voix de Albert CAMUS qui a trouvé la synthèse en précisant que « l’homme n’est pas entièrement coupable : il n’a pas commencé l’histoire ; ni tout à fait innocent puisqu’il la continue ». Nous subissons donc l’histoire mais en même temps nous la faisons ; le danger, c’est lorsque nous la laissons faire sans y participer. Or nous sommes toujours l’histoire et il nous appartient de la saisir, de la pénétrer et s’en inspirer. Ainsi, il est important de comprendre que si les différentes sciences (mathématiques ou sociologie) ou savoirs (morale, religion) instruisent, seul l’histoire construit ce qui doit être appris et compris pour façonner l’homme et l’individu.
Beaucoup se surprendront à penser qu’il s’agit de rentrer dans un cycle de victimisation en ressassant toutes les théories coloniales et néocoloniales. Ce n’est pas vraiment le cas car la nouvelle génération est plutôt positionnée différemment et il s’agit de lui donner des repères pour participer à histoire. Osons être responsable sinon coupable d’orienter l’histoire et de la faire. Seuls, les élites, les pays puissants par leurs moyens ou les entités industrielles, trans nationales diverses (fédérations de sports, géants des media, cercles intellectuelles ou initiatiques etc.) la font. Osons identifier et donner un sens aux sciences dont nous avions besoin en promouvant la géographie et la géométrie de nos terres sans oublier les génies mécanique et industriel qui ont permis d’extraire des minerais et fabriquer des outils depuis les temps immémoriaux. Prônons les savoirs endogènes de la santé et du bien-être au lieu de subir une éducation inutile et inutilisable qui promeuvent autour de nous des modèles mentaux paralysants.
Le recours à l’histoire n’est donc pas la contemplation béate et inutile d’un passé qu’on a tout fait pour décrédibiliser, mais une prise d’élan pour marquer le futur. Les premiers à coacher cette action que nous ne cessons de promouvoir à travers notre journal (éduquer pour l’action) ce sont nos historiens. Ils doivent cesser d’être des simples perroquets pour promouvoir l’histoire qui est non pas seulement la science des sciences mais aussi et surtout la science de la conscience. Alors notre nouvelle génération deviendra prédatrice.
Maoudi Comlanvi JOHNSON, Planificateur de l’Education, Sociologue, Philosophe