Lorsque les gens voient les trois PPP alignés, immédiatement ils pensent à cette belle initiative (ou à cette belle arnaque, selon mon cousin Jean de Dieu) qu’on appelle Partenariat Public et Privé. Moi, j’ai ici une moins noble ambition, c’est de parler prosaïquement du Partenariat Peuple et Pouvoir ou tout simplement de pain.
Je vous vois venir, car d’aucuns diraient que je suis gourmand. Quoi, ne penser qu’à manger : s’il est vrai qu’il faut manger pour vivre, il ne s’agit pas de vivre pour manger ! On se demande pourquoi des gens, de petites gens ne pensent qu’à manger, s’empiffrer alors qu’il faut développer le pays !
Pour élever le débat pour les puristes et autres grands hommes, je me demande quelle relation il peut avoir entre le pain, la prison et la paix. Je me souviens de mes lectures lointaines qui posaient la paix comme le souverain bien c’est-à-dire, qu’il nous appartenait de rechercher l’ataraxie ou encore la paix de l’âme afin de se sentir heureux.
Je suis rustre, avide de pain et rêvant de vin (hélas inaccessible pour moi) et je vous jure que la paix est d’abord dans le pain qui rassasie un ventre affamé et met du lait dans les seins d’une mère. Comment pouvons-nous parler de paix avec vos grands mots vides de sens et de vie ; ces paix qui s’obtiennent par l’effacement du juste qu’on ignore et qu’on tue à petit feu.
Si je me hasarde à parler de prison, je ne suis pas sûr qu’on me comprenne. Chacun se dit que je voudrais parler de voler du pain et se retrouver en prison. Ne me tentez pas, car si vous me dites qu’on mange régulièrement en prison, je me demande ce qui m’empêcherait d’aller me reposer à ne rien faire. Mais je doute que les vautours à cols blancs d’administratifs, aux alentours des prisons, ne laissent grand chose. Je me suis attardé à regarder avec envie un reportage à la télé la dernière fois où un homme au ventre rebondi comme certains honorables de l’hémicycle, offrait des vivres à une prison. Mais un autre passant a crié avec conviction que c’est «mis-en» pour dire «mis-en scène» !
Moi, depuis longtemps, je suis en cage ; dans cette grosse cage où ma vie est vide de sens. Vous pensez que je n’ai pas appris un métier ? Vous vous trompez ! Mais je n’ai pas su malheureusement choisir les métiers en vogue. Mon voisin est fabricant de cercueil et il ne chôme pas ; même la nuit, il travaille. A coté, il y a l’église d’un pasteur, un jeune chenapan du quartier qui a disparu pendant quelques semaines et est revenu, «oint de Dieu» et qui a le talent de vendre les bénédictions comme on vend des petits pains.
Ce qui doit pouvoir étonner ici, c’est qu’on puisse parler de partenariat entre pouvoir et peuple ! C’est tellement évident que c’en est un truisme puisque c’est le peuple qui est censé mettre le pou- voir en place, surtout dans les pays dits démocratiques. Cependant, on assiste à une situation où les gouvernants, pour diverses raisons endogènes (suffisance, vanité, fierté croyant être quasi divins…) et exogènes (en réalité, simples valets d’un impérialisme qui a depuis longtemps assujetti le pays), se retrouvent incompétents. Alors au lieu du pain, on instaure la peur. Chaque miette de pain est donné avec parcimonie afin d’entretenir la misère contre laquelle on ne peut rien. On fait revenir à prix d’or des cols blancs qui n’ont de qualité que d’avoir beaucoup lu dans les livres, mais les résultats sont là, têtus : il n’y a pas assez de pain pour tous. Alors, tout le pays devient une vaste prison.
Quel que soit l’ordre dans lequel vous mettez les différents «P» utilisés ici, vous ne retrouverez aucun plaisir : pain, prison, paix, peur. Heureusement que mon cousin Jean de Dieu, cet éternel optimiste qui a depuis longtemps choisi de ne plus quitter le pasteur (encore un autre «p») de son église, a trouvé la solution : ‘’oui au Bénin, nous avons le PAG !’’.
Maoudi Comlanvi JOHNSON, Planificateur de l’Education, Sociologue, Philosophe