Installation des points de jeux à proximité des établissements : L’autre danger pour l’excellence en milieu scolaire - Journal Educ'Action - Éducation au Bénin et dans le monde
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Installation des points de jeux à proximité des établissements : L’autre danger pour l’excellence en milieu scolaire

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En violation des normes éthiques, voire même de la législation, des points de jeux jouxtent par endroits, des établissements publics comme privés, éprouvant, par moment la tranquillité à tout point de vue des apprenants et enseignants qui sont bien tentés par les jeux de hasard. Potentiels parieurs invétérés, ils y trouvent à la fois leur plaisir et un moyen de renchérissement de leurs ressources. Dans ce numéro de la thématisation du mois qui scrute l’univers des points de jeux en corrélation avec les principes pédagogiques, Educ’Action fait une immersion dans la vie de ces acteurs de l’école qui ne vivent que par les jeux de hasard.

Comme frein à l’éclosion de l’excellence en milieu scolaire, l’installation des points de jeux à proximité des établissements en République du Bénin. Renonçant en toute responsabilité au respect des normes déontologiques en la matière, des promoteurs et tenanciers des salles de loto ou de jeux vidéo font fleurir leurs centres et activités, parfois aux alentours des écoles et collèges avec pour clients potentiels les apprenants, et même des enseignants. L’état des lieux sur le terrain en dit long. Dans le quartier Adovié, arrondissement de Hêvié, commune d’Abomey-Calavi, il sonnait environ 14 heures 30 minutes, ce mercredi 03 juin 2020. La nouvelle voie en construction, raccordant Hêvié à la cité d’Abomey-Calavi, met davantage en évidence le Complexe Scolaire Adovié. En face, est ouvert au public, surtout scolaire un point de jeux de loto. Sa marque distinctive qui frappe tout venant, ces bouts de feuilles ou de papiers jetés en vrac dans la nature, portant des compositions de numéros ou chiffres qui ont servi de paris aux joueurs. Des débats animés sont ouverts ça et là, commentant les premiers résultats de jeux de la journée, rendus publics depuis 14 heures. Les moins chanceux et donc perdants des jeux de la matinée tentaient de se consoler avec l’imminence des résultats de l’après-midi. « Je garde mes chances intactes pour les résultats du soir », lance dans la foule l’un des parieurs, la vingtaine, qui, de l’avis de notre informateur, est un élève et accro de ces jeux de loto. Pour cette journée du mercredi, l’affluence, devant le point de jeux, est, à quelques différences près, identique à celle d’un jour de délibérations des résultats du Brevet d’Etudes du Premier Cycle (BEPC) ou du BAC. Chacun y va de son analyse, de ses commentaires, joie et supplications. Dans le lot des parieurs, se dévisage un groupuscule de jeunes garçons. Entre eux, ils échangent sur la probabilité de décrocher le jackpot à l’annonce des résultats du jeu de l’après-midi prévue pour 18 heures. Le jeune Avossè (prénom attribué), environ 22 ans appartenant au groupe, le regard innocent, vient de ramasser son coupon de papier tombé à même le sol. « C’est une envie incessante pour moi de jouer. Même si je n’ai pas l’argent, je m’arrange pour l’avoir. J’économise mon argent de petit-déjeuner et quand mon père me donne les numéros à jouer puisqu’il joue aussi, je profite pour tenter ma chance en misant également avec les mêmes numéros. Ce qui fait que quand il gagne à son pari, je gagne aussi. S’il perd, je perds également. J’ai pris goût à cela. Des fois, je joue avec l’aide des amis qui s’y connaissent bien », confesse-t-il à Educ’Action, le sourire aux coins du visage. A l’en croire, c’est un jeu qui rapporte, mais qui suscite beaucoup de réflexions. Et comme Avossè, ils sont nombreux ces apprenants à passer le clair de leurs temps à calculer et à parier sur des numéros dans l’espérance de gagner d’importante somme au soir des résultats. Les paris, c’est également dans le rang des enseignants et personnes âgées. « J’ai un collègue enseignant qui a gagné récemment un million (1.000.000) de Francs Cfa. Je joue depuis, mais je n’ai pas encore eu la chance de toucher une somme aussi considérable. Mais je sais que je suis sur la bonne voie et mon heure sonnera. C’est un jeu qui me permet de payer le loyer et la facture. J’avoue que quand j’ai cours de 17 heures à 19 heures, je ne suis pas trop concentré. Je mise souvent, par exemple mille (1000) Francs Cfa et souvent donc, j’ai mes regards et mon attention tournés vers le point de jeux, surtout à quelques heures de l’annonce des résultats de l’après-midi. J’ai un autre ami qui a gagné 500.000 Francs Cfa, le dimanche 31 mai passé. Je sais que jouer à ce jeu n’est pas recommandable, surtout pour nous enseignants, mais… C’est un mal nécessaire », a témoigné à Educ’Action, Clovis (prénom attribué à cet enseignant qui a requis l’anonymat), rencontré devant ce point de jeux de loto, jouxtant le Collège Privé d’Enseignement Technique et Professionnel ‘’Espoir en l’Eternel’’ à Hêvié, quartier Dodji. Connu sous le vocable ‘’Djèbou’’ en langue locale Fon, le loto, autrefois joué une seule fois dans la journée, est passé désormais à deux. Ce qui permet à ses amoureux, de l’avis de certains parieurs, de multiplier les chances de gagner, soit dans la matinée, soit dans la soirée.

Regain pour la création des points de jeux

Le regain des promoteurs des points de jeux loto évolue à une vitesse exceptionnelle, surtout dans l’arrondissement de Hêvié, une localité encore enclavée de la commune d’Abomey-Calavi. En face du Complexe Scolaire Sainte Bernadette, au quartier Adovié, un autre point vient de voir fraîchement le jour. Il s’agit d’une initiative visiblement appréciée par une frange de la population dominée des femmes et jeunes gens qui viennent tenter leurs chances. « Si un enseignant ou parent d’élève joue le jeu loto en présence des élèves, c’est qu’il attise en eux la curiosité. Ce n’est pas bien. Il est bon d’analyser aussi les risques des jeux de hasard avant de les installer dans les zones sensibles, surtout à côté des écoles », rappelle à l’attention des parieurs et accros du loto, Christophe Zéounpké, parent d’élève résidant à Hêvié. « Les probabilités les plus faciles, c’est deux. Tu peux donner deux numéros et espérer que cela va sortir lors du tirage. Tu peux donner trois numéros et dire que c’est deux qui vont sortir. Tu peux donner quatre numéros et proposer que deux viennent. Ça dépend du nombre de numéros que tu souhaites donner. Tout ça à un prix. Tu peux donner de 1 à 20 et ça te fait 200 Francs Cfa. Si deux sortent, c’est que tu gagnes 5000 Francs Cfa. Ça dépend en effet du montant misé sur ton pari. C’est un jeu qu’on joue avant 13 heures 30 minutes pour avoir le premier résultat et le second résultat est à 18 heures. Donc, il faut jouer avant 17 heures 30 minutes », explique ce parent d’élève, lui-même parieur du jeu loto, qui s’est confié à Educ’Action, sous anonymat. Il poursuit dans ses envolées explicatives, martelant que le prix minimum du pari est de 40 Francs par ticket à cause du ticket. Du constat fait sur le terrain, les points de jeux les plus visibles jouxtant des établissements privés comme publics dans l’arrondissement de Hêvié, sont des points de loto. Néanmoins, il faut souligner que des salles de jeux comme les jeux vidéo et le baby foot sont aussi à la portée des apprenants.

Réalisation : La Rédaction

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