Les établissements publics d’enseignements maternel et primaire végètent dans une insalubrité grandissante agissant, peu ou prou, sur le rendement scolaire des apprenants de ce sous-secteur. Pour corriger ce dysfonctionnement, Salimane Karimou, Ministre des Enseignements Maternel et Primaire, a instauré, à travers une note circulaire N°0576/MEMP/DC /SGM/SP en date du jeudi 14 mars 2019, une journée d’hygiène retenue pour tous les derniers vendredis de chaque mois. Une équipe de Educ’Action a fait le tour de quelques écoles de la Région Pédagogique N°28 pour s’assurer de la mise en œuvre de cette disposition de l’autorité ministérielle. Reportage !
Vendredi 31 mai 2019, les acteurs des établissements d’enseignements maternel et primaire doivent, si l’on s’en tient à la teneur de la note circulaire citée supra, s’affairer à donner des coups de balaies aux quatre coins de leurs établissements, à partir de 16 heures 10 minutes. Au Complexe Scolaire Vêdoko II, les apprenants s’y adonnent, bon gré mal gré, avec des coups de balaies sur le crachin qui a visiblement rendu le sol humide. Dans cette école, la journée de l’assainissement instaurée par l’autorité ministérielle a commencé à 16 heures 45 minutes sous le contrôle des directeurs du complexe. Houes et balaies en mains, les apprenants s’attèlent au nettoyage de leur cadre de travail. « Cette décision du ministre est la bienvenue. Cela n’a fait que renforcer les actions que nous avons l’habitude de mener dans notre école, ici à Vêdoko II, surtout l’entretien des toilettes. Notre position par rapport aux bas-fonds nous oblige à sécuriser les enfants », a expliqué à Educ’Action Florent Labité, directeur du groupe A de l’EPP Vêdoko II. A l’EPP Vêdoko I, la scène semble bien désolante. Des sachets plastiques et des feuilles avachies sont balancés de part et d’autres par le vent de ce vendredi. C’est clair, l’entretien n’est pas chose effective ce jour. De l’avis d’un des responsables de l’école, les apprenants seraient prêts pour faire le nettoyage quand la pluie les a surpris, émoussant leur ardeur. S’il faut remonter à l’histoire, un cadre d’assainissement et d’entretien des écoles publiques existait bien avant la révolution d’Octobre 1972.
Du contexte historique …
Au lendemain de l’indépendance du Bénin, les services d’hygiène scolaire animés par les médecins-chefs des circonscriptions médicales et les inspections médico-scolaires de Porto-Novo et de Cotonou assuraient une couverture sanitaire peu étendue du système éducatif. Mais au fil du temps, cet héritage colonial s’est détérioré jusqu’à l’avènement de la révolution d’octobre 1972. Laquelle a suscité une réforme dans l’organisation et la gestion des affaires du pays, particulièrement dans les domaines de l’administration, de l’éducation et de la santé. Dans ce cadre, les centres de santé de district qui ont remplacé les circonscriptions médicales, les inspections médico-scolaires de Cotonou et de Porto-Novo ont été fermés. Une direction de la santé scolaire a été créée en 1978 et est devenue en 1984, la direction de la santé scolaire et universitaire. Ainsi, l’assainissement des écoles passe par la promotion de la santé scolaire.
Du nettoyage mensuel…
Cette décision qui rentre désormais dans les habitudes des usagers des écoles maternelles et primaires agit sur le temps de déroulement des unités pédagogiques, a-t-on appris. « Ah oui ! On ne va pas se voiler la face. De 16 heures 10 minutes à 17 heures dans l’emploi du temps, il y a des activités qui étaient prévues. Mais une fois par mois, cela ne gêne pas encore. Nous essayons de faire avec pour ne pas trop amputer sur les autres activités pédagogiques prévues dans l’emploi du temps », a lâché le directeur de l’EPP Védoko II groupe A. Si à l’EPP Védoko II, l’hygiène mensuelle instaurée par l’autorité ministérielle empiète un tant soit peu sur le temps des activités pédagogiques, ce n’est pas le cas à l’Ecole Maternelle Saint-Michel de Cotonou. « Du tout pas, la raison en est simple. De 16 heures 10 minutes à 17 heures 10 minutes, c’est habituellement l’heure de pause et de gouter des enfants. L’enseignante en charge des élèves dispose de 15 heures à 16 heures pour s’occuper de ses derniers et les instruire. Passé ce délai, elle ne peut plus rien rattraper », fait savoir, sourire aux lèvres, Gelfride Quenum, animatrice de la section des petits à l’Ecole Maternelle Saint-Michel de Cotonou. Dans l’objectif d’appliquer la décision du ministre de tutelle qui invite d’ailleurs les structures éducatives décentralisées à faire des contrôles pour s’enquérir de l’évolution des travaux d’assainissement, les Chefs de régions pédagogiques et les Directeurs Départementaux des Enseignements Maternel et Primaire ne se font pas prier. « Les Conseillers Pédagogiques sillonnent pour voir ce qui se fait dans les écoles ou parfois moi-même je sillonne ou c’est le Directeur Départemental aussi qui s’en charge. Donc, nous faisons de tournées pour voir si les instructions de l’autorité sont en train d’être prises en compte », a affirmé à Educ’Action, Camille Tchiapkè, chef de la Région Pédagogique N° 28. Oui confirme Elvis Kponoukon, directeur de l’EM Saint-Michel : « Les CRPs et les CPs sont passés voir l’effectivité de la campagne de salubrité et l’application de la note circulaire. Avant la prise de cette décision, les écoles maternelles exécutent déjà une activité dénommée activité de vie pratique tôt le matin avec les enfants ». Le directeur du groupe A de l’EPP Vêdoko II vient en appui à son collègue, affirmant que le suivi de la décision est assuré par les chefs hiérarchiques directs qui font des descentes inopinées dans les écoles pour constater la mise en œuvre de l’injonction ministérielle.
Quid des sanctions prévues …
Joint au téléphone dans l’après-midi de ce jeudi 6 juin 2019 pour connaitre des sanctions prévues en cas de non-suivi de la note circulaire, Blaise Agossa, Directeur de l’Enseignement Primaire s’exprime en ces termes : « Lorsque le directeur de l’école est rappelé à l’ordre plusieurs fois par les responsables immédiats, c’est-à-dire les CRP et les DDEMP et qu’il continue, les autres vont rendre compte. La sanction qu’il y a, c’est qu’on va lui adresser une demande d’explication. C’est après étude et analyse de cette demande que nous allons agir. Soit il sera affecté dans une autre école soit il va perdre son poste de directeur ».
Enock GUIDJIME