L’histoire des civilisations nous rappelle que c’est dans les périodes de crises qu’elles progressent énormément. Ainsi, les bonds évolutifs se transforment en bonds quasi révolutionnaires pour le meilleur et aussi le pire. Vous vous souvenez à quel point la guerre de 39-45 a abouti à la reconstruction de l’Occident et malheureusement en même temps, à la multiplication des armes de destructions massives qui ont créé et alimenté tous les conflits dans le monde actuel.
Je sais que nous voulons parler d’éducation et j’ai titré ‘’Que penser ?’’ Il s’agit en fait de réfléchir sur notre avenir car, tel que nous sommes formatés par l’éducation reçue, l’objectif que nous nous fixons presque toutes et tous, c’est comment revenir à la normale ? C’est vrai ; ce sera déjà un grand acquis mais dans un monde où l’occasion de faire des révolutions se présente. Allons-nous continuer notre train-train vers une éducation sans génie où la compétence, et surtout le bonheur et l’épanouissement de l’être ne font jamais partie du programme ?
Vous voulez dire que face au désastre qui ouvre les prisons, il faudrait continuer à attendre l’heure de la sempiternelle soupe qui ne rassasie jamais au lieu de s’échapper pour se prendre en charge ? Les réflexions sont immenses en ce moment et ce qu’on constate, c’est que les grandes institutions et autres Etats qui ont l’habitude de puiser dans nos réserves, se précipitent vers nous. On nous envoie de nouveaux de subsides jamais suffisants dans les différents secteurs : santé, éducation, etc. Et tout cela pour revenir à la normale. Mais moi, je vous dis : le seul objectif que nous devions promouvoir, c’est surtout de ne pas revenir à la normale !
La mort existe et existera toujours, quelle qu’elle soit. Nous avions bravé le SIDA, Ebola, le paludisme, la pauvreté, donc nous savons souffrir. Maintenant, la crise qui secoue l’Occident qu’on découvre fragile et qui va sûrement nous épargner, doit être l’occasion de réfléchir à notre futur et savoir que nous allons mieux nous en sortir que nos amis d’en face.
Si vous voulez, je peux développer quelques aspects non exhaustifs du diagnostic académique et en même temps peu révolutionnaire de ce qui se passera chez nous. En termes d’accès et de maintien, il y aura beaucoup de déperditions à court terme (beaucoup d’enfants sont actuellement dans les champs) et à moyen terme. Lorsque l’école reprendra, certains, même dans les villes, auront peur d’envoyer leurs enfants car, aucun dispositif de lavage de mains ne sera efficace, c’est-à-dire permanent. Mais, a-t-on pensé à une pédagogie de l’hygiène corporelle qui induit la promotion d’une intégrité physique de l’enfant, gage d’une éducation sexuelle ? Cela veut dire que tant qu’il n’y aura pas véritablement une éducation qui apprend à l’enfant l’importance de l’hygiène et de la prise en charge de son corps autant que celui de son esprit pour l’autonomie de son être, on ne progressera pas. Cela signifie que les latrines, les espaces de santé et de prise en charge plus complet devront être présents. Bon, il ne faut pas rêver !
Lorsqu’on parlera d’infrastructures, comment redéfinir l’espace scolaire dans les classes déjà surpeuplées ? En termes d’équité, je sais que l’on va penser à l’équité zone géographique en faisant attention aux démunis, mais comment atteindre les différents milieux et équilibrer les services sociaux de base d’ailleurs inexistants pour la plupart ! En réalité, tout cela pose la question de savoir d’abord comment reprendre le cours normal de nos existences et ensuite ce que nous allons immédiatement ajouter.
Ce qui va se passer, c’est que les mêmes personnes vont se réunir pour réfléchir à cette situation de la même façon qu’ils réfléchissent à la situation de nos écoles, en attendant qu’on leur donne des subsides pour faire quelques tours dans quelques écoles. Elargissons les cercles ; osons rompre les habitudes et réfléchissons à une sortie de crise avec un plan d’action global qui interroge et intègre tous les aspects de notre société (économie, santé, éducation, alimentation, numérique, etc.) avec des réflexions de véritable rupture, et qui va oser aller au-delà du PND et du PAG.
A suivre …
Maoudi Comlanvi JOHNSON, Planificateur de l’Education, Sociologue, Philosophe