Gérer à bon escient son argent et être en mesure de faire des économies relèvent d’une nécessité pour toute personne désireuse de s’offrir un avenir meilleur. Faire des économies, n’est pas l’apanage d’une poignée ou catégorie de personnes mais s’étend à tout âge. Educ’Action aborde dans son dossier thématique de ce mois d’avril, l’éducation financière en milieu scolaire. L’objectif est d’apporter des solutions et orientations aux apprenants dans la gestion quotidienne de leur argent. Pour cette première parution sur une série de quatre, notre descente sur le terrain a permis aux étudiants et apprenants de se prononcer sur leur gestion de l’argent. Lisez plutôt!
Kpèdétin a 11 ans et est élève en classe de 5e au Collège d’Enseignement Général (CEG) ‘‘Le Nokoué’’. Chaque matin, avant de se rendre dans son établissement, il perçoit des mains de ses géniteurs, un montant de deux cent (200) francs CFA pour son petit déjeuner. Frère aîné d’une fratrie de trois (03) enfants, la naissance du dernier enfant de la famille a suscité un changement du point de vue financier, dans la vie de Kpèdétin. Lui qui n’avait pas pris l’habitude de cotiser de l’argent, le fait désormais. Mais au départ, c’était pour un but précis. « J’ai commencé à mettre de l’argent de côté dès la naissance de mon petit frère pour pouvoir lui offrir des jouets avec lesquels il pourra s’amuser », a-t-il confié à Educ’Action avec un visage innocent. Il explique sa méthode : « J’ai pris une carte de tontine où je dépose cent (100) francs CFA par jour et je m’offre un repas de 100 francs aussi à la récréation. Quand j’ai atteint le montant qu’il fallait pour prendre deux petits jouets, j’ai ramassé les sous et avec l’aide de ma maman, mon petit frère a des jouets aujourd’hui. » Les propos de ce jeune garçon sont confirmés par sa mère à qui nous avons difficilement réussi à arracher quelques mots. « Je ne lui ai rien imposé, je ne lui ai rien suggéré non plus. Il a pris l’initiative par lui-même d’offrir des jouets à son petit frère. Au départ, je ne l’avais pas pris au sérieux, mais il l’a finalement fait », a attesté la maman. Après que son objectif est atteint, Kpèdétin n’a pas rompu avec la méthode de cotisation. Désormais, il pense s’offrir des habits et des chaussures pour son propre plaisir avec l’argent qu’il aura mis de côté.
Faire des économies : une difficulté pour certains
Tandis que Kpèdétin se livre avec plaisir à cet exercice, d’autres pensent qu’il serait difficile de le faire et évoquent les raisons. Elodie est élève en classe de 3e au CEG Godomey. Elle qui prend cent cinquante (150) francs CFA comme petit déjeuner ne trouve pas opportun de faire des économies. « Non, je n’ai jamais fait des économies », a-t-elle laissé entendre toute souriante. Tout comme elle, ils sont nombreux, élèves comme parents d’élèves à ne pas juger important le fait qu’un apprenant puisse économiser. Maman Vivi est une écailleuse de poisson au marché de Godomey. Mère de cinq (05) enfants dont une élève en classe de 3e, il serait impossible, à l’en croire, qu’un enfant puisse cotiser avec les temps qui courent. « C’est difficilement qu’on trouve cent (100) francs CFA ou cent cinquante (150) francs CFA aux enfants. Avec la flambée des prix, ce qu’on vend dans les écoles ne pourra pas permettre à un apprenant de faire des économies. Et demander à une fille de cotiser avec ce peu, c’est l’envoyer dans les bras des garçons», s’est-elle exprimée en langue locale fon. Pour beaucoup d’apprenants interviewés sur la question, économiser de l’argent n’est pas de leur habitude. « Je prends cent cinquante (150) francs CFA, je ne peux pas économiser », a dit Bénie, écolière de la classe de CM1 au CSP de Godomey. Ecolière en classe de CE2, Flodora Akakpo, âgée de 8 ans a pris l’habitude d’économiser 5O francs CFA des 200 francs CFA qu’elle prend comme argent de petit déjeuner. « J’essaie d’économiser 50 Francs CFA dans la caisse chaque jour. A l’approche des fêtes de fin d’année, je remets l’argent que j’ai économisé à ma maman. Elle va au marché avec pour m’acheter des vêtements et des chaussures », confie-t-elle.
L’épargne relève d’une équation difficile pour les étudiants
Bertrand Akakpo est étudiant en troisième année de Licence à la Faculté des Sciences Economiques et de Gestion (FASEG) à l’Université d’Abomey-Calavi (UAC). En moyenne, ce dernier, dépense au minimum 5 000 francs CFA par jour. Cela fait deux (02) années que Bertrand est totalement indépendant et ne perçoit plus de l’argent chez ses géniteurs. Entrepreneur digital et investisseur dans l’agriculture et l’élevage, l’étudiant gagne en moyenne 200 000 francs CFA par mois. A la question de savoir s’il arrive à se faire des économies avec sa dépense moyenne de 5 000 francs par jour, il répond à l’affirmatif et explique : « Les économies, je ne les fais pas par mois, mais je les fais en fonction de mes entrées, puisque j’ai fait un compte bloqué à la poste sur un an. Cela me permet d’économiser mes sous. Donc quand je vois que j’ai un certain nombre d’entrées, j’essaie de faire le dépôt et puis je prends le reste pour les petits besoins. Je ne me suis pas donné une ligne de cotisation ». José Avohou est, quant à lui, étudiant en première année de Physique-Chimie à la Faculté des Sciences Techniques (FAST) de l’UAC. Pour ce dernier, il est quasi difficile de se faire des économies avec sa dépense en moyenne de 500 francs CFA par jour. Il précise : « Je prends l’argent par semaine et je suis à 3 000 francs CFA par jour. Je n’arrive pas à faire des économies. Même par mois, je n’ai pas d’économies ». Pour le jeune étudiant en Physique-Chimie, les économies qu’il arrive à faire de façon momentanée ne servent pratiquement pas à grand-chose, si ce n’est de les utiliser aux fins de photocopies. Quant à Amidou Gnongbeto, également étudiant en première année de Physique-Chimie au département de la FAST, sa dépense quotidienne avoisine pour le déjeuner 250 francs CFA, à raison de 1 500 francs CFA par semaine. Tout comme son camarade José, Amidou n’arrive presque pas à faire des économies. Il s’exprime : « Je n’économise presque pas dans les 1 500 francs CFA. Je suis à 25 francs CFA voire 50 francs CFA d’économies sans omettre le fait que ces miettes sont dépensées au cours de la semaine pour raison de photocopies ».
Réalisation : La Rédaction