Deux ans après la révision de la loi encadrant l’exercice du droit de grève : Encore des revendications des enseignants en souffrance - Journal Educ'Action - Éducation au Bénin et dans le monde

Deux ans après la révision de la loi encadrant l’exercice du droit de grève : Encore des revendications des enseignants en souffrance

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Cela fait deux ans que la loi n° 2001-09 du 21 juin 2002, portant exercice du droit de grève en République du Bénin a été modifiée et complétée par la loi n°2018-35. Laquelle loi encadre désormais l’exercice du droit de grève, notamment dans le secteur de l’Education et la plafonne à 10 jours au maximum, l’année. Votre journal Educ’Action fait l’état des lieux des doléances des enseignants avec les syndicalistes officiant dans le secteur de l’Education. Reportage !

Gel des rappels de certains enseignants au niveau du trésor ; absence de prise d’actes d’avancement, de reclassement, de promotion des enseignants, non-amélioration des conditions de vie des enseignants ; chômage dans le rang de certaines catégories d’enseignants. Ce sont quelques doléances égrenées par les secrétaires généraux des confédérations et centrales syndicales rencontrés sur le terrain et qui, pour l’heure, ne sont pas encore pris en compte. Du moins, après l’adoption, le mardi 04 septembre 2018 à l’Assemblée nationale, de la loi n° 2018-35 modifiant et complétant la loi n° 2001-09 du 21 juin 2002, portant exercice du droit de grève, les doléances formulées plus haut par les partenaires sociaux sont restées mortes. « Le gouvernement essaie de faire ce qu’il peut, mais par rapport aux travailleurs, il n’y a pas d’amélioration. Les conditions de vie des travailleurs ne se sont pas améliorées. Il y a beaucoup d’enseignants qui sont à la maison et d’autres sont en voie de perdre également leur travail », se désole Bonaventure Ahitchémè, 2ième secrétaire général adjoint de l’Union Nationale des Syndicats de Travailleurs du Bénin (UNSTB), pointant ainsi du doigt l’insatisfaction de certaines doléances. Son collègue, Noël Chadaré, secrétaire général de la Confédération des Organisations Syndicales Indépendantes du Bénin (COSI-Bénin), n’est pas allé par quatre chemins pour renseigner sur les doléances du secteur de l’éducation. « Les rappels sont gelés au niveau du Trésor public. Même quand on paie, c’est vraiment insignifiant. Les actes d’avancement, de reclassement, de promotion de tous les travailleurs et des enseignants ne sont pas visibles », a fait savoir le SG de la COSI-Bénin, mettant ainsi le curseur sur les préoccupations qui occupent une place de choix sur la carte des doléances des enseignants. Toutefois, il est revenu sur une revendication d’ordre général sur laquelle s’accordent les acteurs des différents secteurs d’activités qui est l’augmentation du SMIG. Il ajoute par ailleurs que si les enseignants ne sont pas contents, ils ne peuvent pas donner un meilleur résultat. « Les doléances n’ont pas connu de satisfaction. Au contraire, la liste du tableau de revendications a augmenté. Le compte-rendu des deux dernières séances de travail de la Commission nationale de concertation et de négociation gouvernement- centrales et confédérations syndicales montre que rien d’important n’est sorti des discussions. Il y a eu beaucoup plus de promesses du gouvernement à satisfaire les doléances », se désole Hector Fanou, ancien secrétaire général du SYNAEM-Bénin, exposant ainsi la lenteur obversée au niveau des doléances. A la lumière des réclamations énumérées, la modification de la loi portant exercice du droit de grève n’a pas profité aux syndicalistes. Cependant, plusieurs raisons auraient motivé les députés de la 8ième législature à la modifier.

Des motivations de la révision de la loi …

Approchés pour connaître les motivations fondamentales qui auraient conduit les députés à adopter cette loi, les anciens secrétaires généraux de syndicats de base ont joué la carte de la franchise. La méfiance réciproque entre dirigeants syndicaux et les gouvernements, l’attachement de certaines organisations syndicales à l’idéologie communiste, la politisation à outrance du mouvement syndical, la division syndicale conduisant à la création de micro syndicats qui se livrent une guerre sans merci au détriment des intérêts des travailleurs sont, entre autres, les raisons, qui, selon les syndicalistes honoraires, ont milité en faveur de la modification de cette loi. « Il faut reconnaître qu’au Bénin, la grève des syndicats a souvent servi les politiciens qui n’hésitent pas à solliciter les syndicats pour renverser des régimes politiques. Ce faisant, les mouvements de grèves animés par les syndicats se sont souvent détournés de leur finalité fondamentale qui est celle de la revendication professionnelle. Il s’est installé une crise de confiance, les travailleurs n’accordaient plus de crédit aux mots d’ordre des responsables des organisations syndicales », a confié Hector Fanou, l’ancien secrétaire général du SYNAEM-Bénin (2012-2017), avant d’ajouter que cette loi comporte des insuffisances.

Quid des insuffisances de cette loi ?

Dix (10) jours au maximum l’année, sept (07) jours le semestre et deux (02) jours le mois. C’est ce qu’il convient de retenir de l’article 11 nouveau de la loi n°2018-35 portant exercice du droit de grève en République du Bénin. « On a constaté que c’est une loi qui empêche les travailleurs d’user de leur droit de grève. C’est vrai qu’il faut revoir l’autre loi, si on estime qu’il y a trop de libertés. Mais il faut le faire avec les acteurs concernés. Il faut évaluer et faire des constats. Il a manqué de pédagogie dans la conception de cette loi. Tous les acteurs devraient être consultés et ensemble nous verrons ce qu’il faut faire pour qu’il y ait plus de travail et moins de grève. Cela n’a pas été fait. C’est la faiblesse majeure de cette loi », a témoigné Noël Chadaré, secrétaire général de la COSI-Bénin avant de souhaiter une relecture inclusive de cette loi. Même son de cloche chez Bonaventure Ahitchémè. « Il faut faire une relecture de la loi, tout en associant les partenaires sociaux que nous sommes », a suggéré le 2ième SGA de l’UNSTB. Par ailleurs, la réduction de la marge de manœuvre des acteurs de l’éducation, notamment des enseignants en termes d’exercice du droit de grève n’a pas manqué de porter atteinte aux libertés syndicale et démocratique. « D’abord, le droit de grève fait partie des libertés fondamentales universelles inviolables. C’est un indicateur positif de l’effectivité de la démocratie. De ce point de vue, c’est la démocratie béninoise qui a reçu un coup avec de telles dispositions. La durée de la grève dans la pratique de la gouvernance sociale permet de jauger le pouvoir politique. La volonté affichée de réduire la durée de la grève est un aveu d’incapacité du régime politique en place de pouvoir faire face efficacement à une grève dans sa durée », a laissé entendre sans ambages Hector Fanou, pour mettre en lumière quelques insuffisances de cette loi.

Enock GUIDJIME

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