Après deux lunes toutes entières, la petite école du Bénin s’éveille de nouveau. Lundi 3 octobre 2016, jour consensuellement retenu par l’Etat central conformément au calendrier scolaire de l’année précédente pour la reprise effective des activités académiques au Bénin. Depuis hier donc, écoliers, élèves, collégiens, lycéens, enseignants, parents d’élèves, partenaires sociaux et autorités en charge du secteur de l’éducation ont fait leur rentrée officielle des classes. De la maternelle au secondaire, les vacances ont laissé place aux études. Educ’Action, seul média spécialisé en reportage et investigation en Education au Bénin, effectue aussi sa rentrée des classes par le constat de terrain. Une équipe de la rédaction de votre journal a sillonné dans la matinée d’hier, quelques écoles de Cotonou et de ses environs pour prendre le pouls de l’effectivité de la reprise des classes. Constat d’une descente aux couleurs de la rentrée, c’est avec la rédaction de votre journal…
Calme plat, personne dans la cour de l’école. Le seul bruit qu’on entend est celui des véhicules et motos qui circulent sur le pavé faisant corps avec l’entrée principale de l’école. Ne vous y trompez pas. Il s’agit bien du Collège Notre Dame des Apôtres de Cotonou, un collège confessionnel privé de la place, réputé pour ses performances aux examens nationaux. C’est le signe que les cours ont bel et bien repris dans cet établissement privé de l’enseignement secondaire. Seuls dans la cour, des parents d’élèves se dirigeant vers le bureau de la directrice pour des renseignements divers et des préoccupations particulières liées à l’inscription de leurs progénitures dans ce temple du savoir. En face, au CEG Gbégamey, un collège public, vieux de plusieurs années, l’entrée est bondée d’élèves qui s’apprêtent à rentrer dans le collège. Les enseignants, parents d’élèves, censeurs et autres responsables de la chaîne d’inscription et d’affectation des classes et emplois du temps n’ont autre temps que de se résoudre à solutionner les problèmes des uns et des autres. Sur place, Lucien Kokou, le Ministre de l’Enseignement Secondaire, de la Formation Technique et Professionnelle (MESFTP), venu rehausser de sa présence le lancement de la rentrée. Occasion pour l’autorité de galvaniser le personnel d’encadrement invité à plus de responsabilité dans la conduite des activités académiques de cette année ouvrée. Lucien Kokou, dans son adresse au corps enseignant, n’a pas manqué d’inviter les enseignants à une gestion rationnelle du temps : « Je commence par souhaiter une bonne reprise des cours à tous les enseignants quels que soient leurs rangs ou leurs grades sur l’ensemble du territoire national. C’est sous le signe d’une gestion rationnelle du temps pédagogique que nous plaçons cette nouvelle année», a dit le ministre Lucien Kokou avant de procéder au lancement à proprement parler de la rentrée. Face aux enseignants, il rassure que son ministère et le gouvernement s’engagent pour le dialogue avec le corps enseignant pour ne pas perdre du temps. Il poursuit qu’aucun problème ne peut être résolu dans le bruit et qu’il travaille à solutionner les problèmes soulevées par le Front. « Cette année, le cabinet s’est mis au travail et les problèmes que nous avons dans le système, nous les connaissons. On a commencé par aborder les problèmes étape par étape », informe l’autorité ministérielle pour apaiser les enseignants mécontents qui ne décolèrent pas. Nicolas Hountondji, directeur du CEG Gbégamey, reconnait aussi que : « la rentrée est effective, vous avez vu que le ministre vient de passer et il a lancé l’année scolaire ici. Mes professeurs sont arrivés et ils étaient en classes quand le ministre avait dit de les faire descendre pour qu’ils puissent les rencontrer à la salle des professeurs. Les emplois du temps sont faits, les élèves sont là et les professeurs aussi ».
Rentrée des classes rime avec la rentrée des pratiques et habitudes obsolètes dans le public…
A côté, à l’Ecole Primaire Publique de Gbégamey-Sud, c’est le même silence à la différence que ce calme est dû à la rarissime présence des élèves. D’abord, dès l’entrée de l’école, l’insalubrité règne en maître, dénotant de ce que la pré-rentrée soit n’a pas été observée, soit bâclée. Les bâtiments délabrés de l’école dégagent un sentiment de pourriture, qui pourrait justifier le manque d’engouement des élèves, ajouté à l’air nauséabond dégagé par les immondices laissés de part et d’autre dans l’établissement. Rencontré devant ses élèves, Joseph Akakpo, instituteur à l’EPP Gbégamey-Sud A, nous renseigne : « le démarrage était prévu pour cette journée à 8h. La pré-rentrée a commencé depuis le lundi passé, mais il s’est fait que du lundi au vendredi, aucun élève n’était présent pour la pré-rentrée qui a été fixée par le ministre. Donc, ce matin vers 7h30 mn, il y avait déjà une grande affluence des élèves. Du fait que les activités qui ont été prévues la semaine passée n’ont pas pu se tenir, c’est maintenant que nous faisons le nettoyage, car, on ne peut pas travailler dans l’insalubrité ». Sur place, les déclarations de l’instituteur peuvent se vérifier tant notre équipe de reportage surprend certains écoliers qui s’efforcent de faire le ménage en balayant la devanture de leurs classes et de leurs alentours. A quelques encablures de l’EPP Gbégamey-Sud, à l’Ecole Primaire Publique Saint Jean 1, les écoliers ont aussi repris le chemin de l’école. Des parents d’élèves comme à l’accoutumée, inscrivent leurs enfants et les orientent vers leurs différentes classes. Germain Gadjagboué, enseignant dans cette école déclare que : « les écoliers sont là, nous-mêmes sommes là, la pré-rentrée est passée. La rentrée est effective ». De Gbégamey à Hindé, il vous faudra quelques minutes pour rallier à moto le Complexe scolaire le Berger. De blanc vêtu, le censeur de l’école, Hervé Zannou, reçoit les enseignants qui passent à tour de rôle pour retirer les emplois du temps. Pendant que certains parents se soumettent à des formalités tardives d’inscription auprès de l’administration, des élèves se saluent, se taquinent, se confient des petites confidences des vacances et rient aux éclats. Selon lui, la rentrée a effectivement démarré dans son école comme on peut aisément le constater. « Les parents sont en train de sortir à compte-goutte, vu les difficiles conditions actuelles de vie. D’ici 15 heures, les cours vont démarrer et tout ira bien. Je crois que pour cette année, on doit les exhorter à la responsabilité. Il faut que les enfants sachent que quand ils n’ont pas un niveau requis, ils ne pourront pas passer dans les classes supérieures, ni réussir à l’examen », conseille-t-il à ses apprenants. Dans les allées du cours primaire se trouvant au rez-de-chaussée de ce bâtiment à deux étages, l’ambiance est différente. Il y a, à peine de la place pour circuler devant les classes où les enseignants rencontrent et discutent avec certains parents d’élèves venus se soumettre aux dernières formalités de rentrée.
Les inondations, l’autre phénomène naturel perturbateur de la rentrée…
Embouteillage, nids de poules, flaques d’eaux, c’est l’esquisse du parcours de combattant qu’il faut faire pour arriver à l’école des sourds située à Vèdoko, dans le 10ième arrondissement de Cotonou. C’est une atmosphère de bidonville que cela présente. D’ailleurs, l’école est dans un bas-fond qui frappe l’esprit dès qu’on franchi son seuil. Elle reçoit pourtant des personnes à besoins spécifiques. Les propos du directeur, Bienvenu Komaklo, sont assez édifiants : « Nous avons commencé la rentrée mais il y a un hic. Notre école a été inondée depuis hier à cause de la pluie qui s’est abattue sur Cotonou. Nous avons seulement un module de trois classes qui est disponible car, l’autre module est totalement dans l’eau. Nous allons jumeler mes six classes de l’école, deux par deux, dans ces trois salles. Nous sommes en train de mettre les bouchées doubles pour que dans l’après-midi, on puisse démarrer les cours. C’est seulement les tables et bancs qui ont été touchés par cette inondation. Malgré ces difficultés, nous exhortons les parents à envoyer les enfants. A l’endroit des autorités, on va leur demander de penser sincèrement à cette école. La solution serait de la délocaliser complètement, sinon de prendre les dispositions pour que cela ne se répète plus. Le second problème, c’est que nous n’avons pas reçu de formation pour mieux encadrer nos élèves sourds muets. On a besoin d’être formé comme nos collègues du primaire et du secondaire ». C’est un véritable défi psychopédagogique pour les élèves et les enseignants qui devront encore vivre neuf mois dans un cadre ergonomiquement inadapté sinon invivable. Espérons qu’à la date du 18 septembre 2017, jour de la rentrée scolaire 2017-2018, les autorités en charge de l’éducation auront une pensée affective pour l’école des sourds muets de Vèdoko.
Reprise sur des chapeaux de roues pour certains collèges publics et privés …
A quelques minutes de marche de l’école des sourds muets de Vèdoko pour se rendre au collège privé « Sainte Laurette » sis au quartier Mènontin, le personnel administratif a reçu, avant 8 heures, un grand nombre de parents d’élèves. Ceux-ci sont venus remplir les dernières formalités d’inscription pour leurs enfants. Une fois passée l’échangeur de Houéyiho, le Collège Catholique Père Aupiais, sis à Cadjèhoun nous accueille. La cour de l’école est silencieuse, mais les classes étaient remplies d’apprenants qui prêtaient une oreille attentive aux enseignements donnés par les professeurs. Au CEG l’Océan qui n’est pas loin, le constat est identique. Cependant, quelques apprenants attendent toujours l’avis du directeur avant de prendre place dans les classes. D’autres, munis de leurs dossiers de transfert, se montrent impatients, le souci de vite renouer avec les tables et bancs, obligeant. « La rentrée est réellement effective. Vous voyez déjà dans la cour que les apprenants sont là, accompagnés de leurs parents », affirme Hugues Tchoukpa, enseignant des SVT et directeur du CEG l’Océan. A propos des enseignants, il ajoute : « J’ai déjà beaucoup de professeurs qui ont fait cours ce matin y compris aussi deux syndicalistes qui ont déjà planché ».
Le Nokoué et Zogbo aussi dans la danse de la reprise …
Des regroupements d’élèves discutant de tout et de rien d’une part ; des élèves consultant l’emploi du temps pour s’imprégner du déroulement des cours de leurs classes d’autre part, d’autres en pleins cours pour ce début de rentrée ; une affluence de parents se précipitant pour l’inscription de leurs progénitures malgré la boue qui fait glisser plus d’uns. Dans l’administration, directeurs, censeurs, surveillants généraux, tous affairés à la tâche pour valider l’inscription des nouveaux élèves dont les parents attendent toujours le dernier jour pour se manifester. Ce sont-là, quelques images à retenir de la cour du collège le Nokoué en ce 3 octobre, jour de la rentrée scolaire 2016-2017. Rencontré dans son bureau malgré son empêchement, le directeur Louis Dochamou confirme l’effectivité de la rentrée dans son établissement même s’il déplore le retard de certains parents d’élèves qui attendent toujours le dernier jour pour venir remplir les formalités d’inscription et de réinscription. Dans son établissement, tout semble être fin prêt à tout le moins au niveau de l’administration : « Ce matin, avant le démarrage, j’ai tenu rapidement une petite séance de travail avec les professeurs permanents. Tous ont reçu leurs emplois du temps et ensemble, on a pris connaissance du contrat de la nouvelle année scolaire. Ils sont allés dans les classes pour la plupart et les cours ont démarré en même temps ». Dans le rang des anciens élèves du CEG le Nokoué, nombre d’entre eux vont prendre le train en marche, car, malgré la présence des professeurs, les salles de classes sont presque désertes. A quelques kilomètres du CEG le Nokoué, le constat est le même au CEG Zogbo. Le directeur Maurille Mondé rassure de ce que les cours ont effectivement commencé dans son établissement. « Ici à Zogbo, la pré-rentrée de la semaine écoulée a servi pour le conseil des professeurs et des membres de l’administration. Aujourd’hui, comme vous pouvez le constater, les salles de cours sont remplies d’apprenants et chacun des professeurs sait à quoi s’en tenir pour une année scolaire apaisée et réussie ». Les deux directeurs n’ont pas manqué de prodiguer des conseils aux acteurs de l’éducation en général et aux professeurs, en particulier. « C’est toujours soulageant de se présenter au guichet en ayant à cœur, la joie d’avoir bien fait son travail. J’invite donc les professeurs à faire correctement leur travail pour un bon résultat en fin d’année ». se sont-ils adressés au personnel d’encadrement sous tutelle.
La Rédaction