Conseil National de l’Education : Les acteurs du secteur éducatif exposent leurs attentes et défis - Journal Educ'Action - Éducation au Bénin et dans le monde

Conseil National de l’Education : Les acteurs du secteur éducatif exposent leurs attentes et défis

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Ils sont vingt-neuf (29) cadres de haut niveau, issus des diverses chapelles éducatives du Bénin à siéger au Conseil National de l’Education (CNE). Après leur installation, les sages de l’éducation auront un vaste champ à labourer, tant la tâche est colossale pour redonner au système éducatif béninois ses lettres de noblesse. Le travail à abattre se fera avec l’interaction des différents acteurs du système à tous les niveaux d’enseignement. Enseignants, syndicalistes, élèves, parents d’élèves, Partenaires Techniques et Financiers, organisations de la société civile, tous ont les yeux rivés sur les 29 conseillers qui doivent tirer le système éducatif de la gadoue dans laquelle il baigne. Dans cette deuxième parution du mois d’Avril, consacré au Conseil National de l’Education, Educ’Action vous expose les attentes de divers acteurs qui partagent leurs espoirs et les défis que l’équipe conduite par Noël Gbaguidi doit relever. Bonne lecture !

Depuis leur installation le 21 Janvier 2020, les acteurs du système éducatif béninois à divers niveaux attendent les membres du Conseil National de l’Education (CNE) sur plusieurs chantiers qui diffèrent d’un acteur à un autre. Dans le rang des syndicalistes du sous-secteur de l’enseignement secondaire, technique et de la formation professionnelle, les voix sont montées au créneau pour dénoncer les anomalies que doivent réguler le CNE pour permettre au système éducatif béninois de retrouver ses lettres de noblesse. « Le Conseil National de l’Education doit revoir les programmes d’études de la maternelle jusqu’au supérieur ; reformuler les curricula de formation et les adapter au besoin du marché du travail car l’école forme des diplômés qui ne sont pas capables de se prendre en charge », a énuméré en premier lieu, Alexandre Adjinan, syndicaliste et président de la Commission nationale des jeunes de la Confédération des Organisations Syndicales Indépendantes du Bénin (COSI-Bénin) tout en ajoutant que le CNE doit penser à doter également les écoles, lycées, collèges et universités d’infrastructures d’accueil et de matériels didactiques. Le syndicaliste ajoute par ailleurs que le recrutement d’enseignants au niveau des différents sous-secteurs, le suivi rigoureux des problèmes de formation, de gestion de carrière sont autant de chantiers sur lesquels le CNE doit se lancer. De façon spécifique, pour le compte de cette année scolaire en cours, le syndicaliste Alexandre Adjinan estime que le Conseil National de l’Education doit s’impliquer dans le processus du ‘’système d’aspiranat’’ qui est institué dans les sous-secteurs des enseignements maternel et primaire, secondaire, technique et de la formation professionnelle. Il doit également éviter la décision du gouvernement qui consiste à confier la gestion d’une catégorie d’enseignants à des structures privées. Les problèmes de carrières et les problèmes liés à l’évaluation à laquelle le gouvernement a soumis les Agents Contractuels de l’Etat de la promotion 2008 sont également des choses à revoir au cours de cette année de l’avis du syndicaliste. D’un syndicaliste à un autre, c’est Thierry Dovonou qui énumère les préoccupations qui, selon lui, sont primordiales pour un bon fonctionnement du système éducatif du Bénin. Pour cette année déjà perturbée par le coronavirus, l’homme pense qu’il serait primordial que le CNE repense l’organisation des apprentissages. De l’autre côté, à en croire ce défenseur des droits des enseignants, le CNE doit se pencher sur la question des mutations punitives qui se font à tout vent quand une autorité a un compte à régler avec un enseignant. Ainsi, le CNE doit réhabiliter tous les enseignants mutés de façon punitive et frauduleuse. La nomination des cadres du secteur de l’éducation doit être vue et approuvée par le CNE de l’avis de Thierry Dovonou pour éviter les conflits d’attribution qu’on observe çà et là. L’autre défi que pourra relever le CNE un peu plus tard est, selon Thierry Dovonou, la dotation d’un seul statut particulier à tout le personnel enseignant de la maternelle au supérieur pour mettre en cohérence tout l’ensemble du système éducatif. « Faire un code de déontologie pour l’éducation ; réorganiser les écoles normales de formation, ENI et ENS, dont le fonctionnement sort de l’entendement ; pallier le manque criard d’enseignants dans les collèges et revoir la nomination des directeurs d’écoles et de collèges », sont les autres grands défis que doivent relever le CNE de l’avis de Thierry Dovonou. Conseiller technique de l’enseignement technique au ministère des enseignements secondaire, technique et de la formation professionnelle, René Mathias Akakpo n’a pas manqué d’exprimer ses attentes vis-à-vis du Conseil National de l’Education (CNE-Nouveau format). « La première des choses, c’est l’encadrement de nos ministères pour une meilleure orientation des jeunes, parce que les parents n’ont pas l’information utile, pertinente pour orienter les jeunes au secondaire ou au supérieur. Il n’est pas normal qu’on impose un métier à un enfant », a souligné le CT qui ajoute qu’il faudra revoir la manière dont on autorise l’ouverture des établissements privés. A ce propos, il suggère : « une planification rigoureuse des spécialistes dont le Bénin a besoin. Donc, en lien avec le secteur privé, nous devrons définir des priorités. Moi j’attends le CNE sur ces chantiers pour que nous puissions avoir des techniciens qualifiés que nous pouvons même exporter. Donc, il faudra améliorer nos offres de formation pour mieux faire ».

Le rôle du CNE face à l’usage de la drogue et la pornographie à l’école

Suite aux nombreuses vidéos à caractère pornographique filmées dans certaines écoles de la place, les syndicalistes rencontrés dans le cadre de ce travail pensent que le CNE a son rôle à jouer. Tout en estimant que ces dérapages observés dans le rang des apprenants dénotent d’une part de la démission des parents d’élèves en ce qui concerne le suivi des enfants et d’autre part sont dus à l’interdiction de certaines mesures punitives comme le châtiment corporel, Alexandre Adjinan préconise que soit davantage remodelé, le règlement intérieur des lycées et collèges pour renforcer le pouvoir des enseignants, des autorités de l’administration scolaire et des responsables chargés de la discipline afin que les sanctions soient à la hauteur des dérapages constatés chez les apprenants. Aussi, faudra-t-il instaurer l’enseignement du civisme dans nos lycées et collèges dans le but d’apprendre aux élèves non seulement les connaissances liées aux notions enseignées ou le savoir-faire mais aussi et surtout le savoir-vivre. Thierry Dovonou quant à lui, dénonce non seulement la proximité des chambres de passage avec les lieux de savoir mais aussi la relation entre élèves et professeurs qui fréquentent en plein jour ces lieux. C’est d’ailleurs pour cela, qu’un code de déontologie serait le bienvenu selon lui. Aussi, le CNE voudrait-il bien interdire certaines images et films au niveau des télévisions qui incitent à la débauche et recadrer les ONG intervenant dans les écoles et collèges sur l’éducation à la sexualité, a-t-il souhaité.

Des syndicats dans l’attente de meilleurs résultats

«Notre vœu est que l’enseignement maternel soit financé à la hauteur de son importance dans le système éducatif. Nous souhaitons que le CNE puisse orienter le gouvernement pour que le taux d’investissement du budget national de l’éducation soit concentré sur le développement de la petite enfance. Nous voudrions également que l’âge minimal pour accéder à l’école maternelle soit de 3 ans révolus et que l’enfant passe nécessairement les deux ans pour avoir 05 ans avant d’aller au cours primaire. Nous attendons également que les actions d’équipements des écoles maternelles soient une réalité. Nous attendons que l’approche communautaire soit concrète afin que nous puissions relever le taux de préscolarisation à la maternelle », a annoncé pèle mêle Gaétan Kponoukon, secrétaire général du Syndicat National des Enseignants des Ecoles Maternelles du Bénin (SYNAEM-Bénin) pour renseigner sur quelques attentes de son syndicat sur le tout nouveau CNE installé le mardi 21 janvier 2020. Ulrich Accrombessi, SG du Syndicat National des Enseignants Engagés pour une Relève de Qualité au Bénin (SYNEERQ-Bénin) s’est montré laconique dans ses propos en termes d’attentes de son syndicat à l’endroit du CNE. « Le SYNEERQ-Bénin attend de cette équipe le respect strict du cahier de charges dans le contexte de prise en charge des besoins de la classe », a-t-fait savoir avant d’affirmer que l’équipe actuelle est à la hauteur de sa tâche.

Educo-Bénin : Dans l’attente d’un CNE dépolitisé

«Nous attendons donc qu’en tant que nouveau cadre de gouvernance de l’école au Bénin, le CNE travaille comme l’a souhaité le Chef de l’Etat lors de son installation, à ‘’reconstruire le système éducatif ’’en phase avec les ambitions économiques et sociales du pays. Nous attendons que l’installation du CNE sonne la fin des interventions politiques ou politiciennes dans les processus d’affectations et de promotion des enseignants car cet état de fait influence considérablement la qualité de l’encadrement des apprenants et par ricochet la qualité de l’éducation. Nous attendons le CNE sur un chantier important, celui du renforcement des capacités des enseignants surtout de la maternelle, du primaire et du secondaire technique et de la formation professionnelle. La mise en œuvre effective de la stratégie nationale de l’enseignement et de la formation technique et professionnelle est également un chantier sur lequel Educo espère que le CNE fera des avancées notables ». Ce sont les attentes de Educo Bénin annoncées par Ernest Athigbedjou, référent thématique éducation à Educo-Bénin pour montrer que l’organisation à vocation éducative a un œil regardant sur l’instance supérieure décisionnelle de l’éducation. Rappelant les critères qui ont permis aux 29 membres du Conseil National de l’Education (CNE) de faire partie de cet organe supérieur décisionnel de l’éducation, Ernest Athigbedjou, reconnaît la qualité des personnalités que constitue le CNE d’aujourd’hui.

Avis des directeurs d’écoles du secondaire

Bernard Lahamy, directeur du CEG Godomey

«Nous attendons du CNE, de se rendre disponible en aidant le ministre à prendre des décisions qui vont dans l’intérêt de tous. Puisque ce sont des gens outillés et expérimentés. Le ministre aussi l’est, donc ça fait un creuset d’intelligents.Surement que cela va améliorer les solutions apportées à l’école. Le CNE, n’a pas de défis à relever en dehors de ce que le ministre aura décidé. Je pense que c’est le rôle du CNE d’aider le ministre à prendre des décisions. Donc, nous attendons une bonne collaboration entre les ministères en charge de l’éducation et le CNE, pour qu’il n’y ait pas une cacophonie de comportements ou bien de discours qui mettent à mal le système éducatif. Donc, il doit y avoir une très bonne collaboration pour que tout le monde puisse s’en sortir. Les priorités du CNE ne sont que les priorités du gouvernement, les priorités du ministre. Il s’agit simplement, de mon point de vue, qu’il y ait une bonne collaboration, qu’il y ait des échanges au niveau du CNE avec le ministère pour de très bonnes décisions. En mettant le CNE en place, c’est pour une meilleure gouvernance.

Karl Chrysostome Dofonnou, directeur du collège la Plénitude

«Le CNE ne doit pas être une caisse ou une coquille vide qui n’existe que de nom. Elle doit vraiment jouer son rôle qui est d’imprimer une orientation véritable à l’éducation dans notre pays en fonction des défis à relever. Il s’agit de l’éducation au service du développement économique et social. Pour cela, il faut revoir les curricula des programmes d’études qui aujourd’hui sont très denses et laminent aussi bien les apprenants que les enseignants. On n’a plus besoin de bourrer autant la tête des apprenants mais juste le minimum nécessaire à leur évolution intellectuelle. Ensuite, il faut réfléchir à un système où les apprenants seront en classes les matins et dans des ateliers les soirs car aujourd’hui, ce n’est plus tellement le qu’est ce tu connais ?, mais plutôt le qu’est-ce que tu sais faire ?. Il nous faut donc concevoir un système qui cesse de former des chômeurs à cols blancs, des diplômés sans travail. L’autre chose aussi c’est de donner une formation aux jeunes en fonction des besoins de l’économie ou de la nouvelle évolution de l’économie et pour finir, il est important de mettre un accent particulier sur l’enseignement technique et la formation professionnelle en généralisant les écoles et lycées techniques au détriment des écoles d’enseignement général qui ne produisent que des chômeurs. Elles ont joué un grand rôle au cours des premières décennies post coloniales, mais depuis, avec la poussée démographique de notre pays et l’évolution technologique dans le monde, elle est devenue dépassée, caduque, inappropriée. Il faut développer l’enseignement technique et la formation professionnelle, former les jeunes pour qu’ils puissent faire quelque chose. Ce sont les défis aujourd’hui et le CNE ne doit pas perdre cela de vue.

Réalisation : La Rédaction

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