Le 02 avril, c’est la journée mondiale de sensibilisation à l’autisme. Il s’agit d’une initiative instituée en 2007 par l’Organisation des nations unies (Onu). Elle contribue aux changements des mentalités sur les stéréotypes et sur les idées reçues sur l’autisme en favorisant une meilleure inclusion des personnes atteintes d’autisme dans notre société. Au Bénin, l’édition 2022 de cette journée a été commémorée par différents acteurs de la société civile à travers des activités de sensibilisation en vue d’une prise en charge socio-éducative des enfants autistes. Sur cette problématique, Educ’Action a tendu le micro à Alain Assogba, Coordonnateur de la plateforme sociale Cœur d’Enfants Bénin-Togo, et représentant de la fondation KABLAN Joseph pour l’Autisme en Afrique, Bénin-Togo. Lisez plutôt !
Educ’Action : L’autisme, qu’est-ce que c’est ?
Alain Assogba : L’autisme est une déficience, un handicap neuro-developpemental qui atteint l’enfant avant l’âge de trois ans. Elle n’est pas une maladie mentale, c’est juste une différence. Elle se manifeste généralement par les troubles de communication, des troubles des interactions sociales et des caractères répétitifs et stéréotypés des comportements. Quoique chaque personne autiste présente des symptômes qui varient en sévérité et en fonction de l’âge, on observe chez les personnes atteintes d’autisme des difficultés marquées qui s’établissent comme suit: difficultés à entrer en relation avec les autres ; elles s’isolent, on voit absentes dans les groupes, souvent leur regard est fuyant ; elles s’expriment mal ou pas du tout, comprennent et interprètent autrement les choses ; quand elles parlent, elles peuvent revenir de façon incessante sur un sujet particulier ou répéter les mêmes mots et phrases ; des mouvements anormaux, des gestes stéréotypés sont aussi remarqués: balancement, grimaces, démarche. Voilà des signes distinctifs chez les enfants atteints d’autisme.
Pourquoi vous intéressez vous à l’autisme en sensibilisant les populations ?
Nous nous intéressons à cette affection, car à ce jour, subsistent encore « des dits et des non-dits au sujet de l’autisme. Pour certains, ce sont des enfants sorciers. D’autres estiment que ce sont des enfants mongoles, c’est-à-dire ce sont des personnes qui souffrent de trisomie 21 ; ces personnes sont certes différentes des autistes, mais un autiste peut être mongolien. Donc la comparaison n’a pas lieu d’être ici. Parfois, on va jusqu’à dire que ce sont des enfants issus d’un acte adultérin de la maman. Alors, en vue d’arrêter la saignée, nous nous sommes résolus à sensibiliser le grand public pour lever le voile sur ce mythe et surtout taire les préjugés que subissent à tort les autistes et leur famille. Cela passe nécessairement par la communication et les échanges répétés sur cet handicap pour espérer voir un changement de mentalité de tous.
Comment prendre en charge sur le plan socio-éducatif un enfant atteint d’autisme ?
La prise en charge sur le plan socio-éducatif des enfants autistes passe par la détection chez l’enfant, c’est le premier pas. Ensuite, le diriger vers les centres sociaux de prise en charge. Là, le personnel lui mettra à disposition des outils appropriés dans la perspective de corriger ses troubles de langage avec l’application de la répétition de quelques méthodes de travail. Il faut noter que le trouble du spectre de l’autisme présente des degrés de sévérité qui diffère d’une personne à une autre, allant donc du faible au sévère en passant par le degré moyen. De ce fait, chaque cas nécessite une prise en charge particulière et adaptée au besoin du patient. Pour ces enfants qui peuvent intégrer une salle de classe normale avec ou sans auxiliaire de vie scolaire, éducateur spécialisé ou tout autre personne pouvant l’aider pendant son cursus scolaire, naturellement ils se verront inscrits dans une école pour bénéficier d’une éducation. Mais dans le cas contraire, ils peuvent être suivis à la maison par les spécialistes sus-mentionnés, un orthophoniste, ou encore intégré une école ou un centre spécialisé pour les autistes.
La présente journée mondiale de sensibilisation à l’autisme a mis l’accent sur l’alliance parents-professionnels. Quel en est l’enjeu ?
Cette année, nous misons sur la bonne complicité, confiance et collaboration entre parents et professionnels dans l’optique de garantir désormais à tout enfant autiste l’acceptation de leur différence et leur prise en charge en vue de faciliter leur développement et rendre possible leur intégration socioculturelle. Les parents jouent le rôle le plus important dès les premiers instants de la vie d’un enfant. Ils sont des acteurs incontournables pour le bien-être et le développement de ces derniers. Etant donné que la prise en charge d’un autiste est pluridisciplinaire, il est plus qu’important que les parents soient impliqués à 80%. Un parent formé, informé et outillé est à même d’effectuer une prise en charge domestique précoce efficiente, et ainsi être d’une grande aide dans le combat contre cet handicap. Tel est l’enjeu de ce thème.
Un enfant atteint d’autisme peut-il en guérir une fois pour toute ?
De façon scientifique, l’autisme ne se guérit pas totalement. Plus tôt l’enfant est pris en charge, vite les symptômes s’améliorent. Mais, plus la prise en charge est tardive, moins il trouve de satisfaction. Guérir une fois de bon est chose rare. Les scientifiques s’accordent à dire qu’il ne se guérit pas, mais une prise en charge précoce et adaptée permet une nette amélioration des symptômes.
Parlez-nous de quelques actions que mène votre plateforme en matière d’éducation, notamment des enfants atteints d’autisme ?
La Plateforme Cœur d’Enfants est une organisation mise en place dans l’objectif de sensibiliser, d’éduquer et d’assister. Nous intervenons généralement dans deux domaines : la santé et l’éducation. Le but principal est d’améliorer les conditions de vie des enfants en situations difficiles et de bâtir des hommes responsables de demain. Nous organisons plusieurs activités de renforcement de capacité des jeunes, des actions sociales en faveur des orphelins en milieu rural, de petits projets solidaires en faveur des enfants. Existant depuis 2017, nous avons soutenu deux mille cinq cent cinquante (2 550) en kits scolaires et disposant de onze (11) enfants qui bénéficient d’une prise en charge de 10 ans. Nous travaillons sur un projet avec la fondation KABLAN Joseph pour l’Autisme en Afrique, en vue de la création d’un centre de prise en charge des enfants autistes au Bénin, Togo et bientôt au Burkina Faso.
Au Bénin, nous disposons, suite à un arrêté communal, d’un terrain d’une superficie de deux hectares à Honhoué dans la commune de Houéyogbé pour accueillir ce projet de Centre de prise en charge des enfants autistes. Nous envisageons un centre qui sera un cadre d’accueil, de suivi et d’insertion socio-professionnelle des autistes et enfants en situation difficile. Nous aurons en son sein un institut médical, une école spécialisée pour autiste, une aire de jeux, un centre d’hébergement, un centre de formation pour parents et professionnels, un gymnase, une piscine et de petits centres d’apprentissage en couture, soudure, coiffure et autres, etc.
Propos recueillis par Obed SAGBO (Coll.)