À la recherche du désir - Journal Educ'Action

À la recherche du désir

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À la suite d’auteurs comme Claude Lévi-Strauss, on soutient généralement que la règle de prohibition de l’inceste fonde nos sociétés. Elle a, en effet, rendu possible la culture avec cette nécessité de l’effort pour arriver au plaisir sinon à la réalisation de soi. Cette même idée du dépassement de la nature ou encore du simple désir pour fonder nos sociétés à travers l’effort, se retrouve dans la Bible à travers l’allégorie de l’homme déchu des félicités du jardin d’Éden. Le paradis n’en était pas vraiment un dans le sens où il aurait consisté à ne rien faire tout en arrivant à une confusion totale entre nos désirs (c’est-à-dire nos envies) et nos plaisirs (c’est-à-dire la réalisation de ces désirs). Or, arrivé à cette situation, l’homme, stricto sensu n’existe plus ou plutôt reste dans l’enfance ou se réduit à un animal instinctif car il ne fait aucun effort d’intelligence et de volonté.
Le Seigneur, dans sa générosité, a donc donné à l’homme cette autonomie de conscience. Elle est le moyen de sortir du piège de la félicité infinie qui aurait mené au vice, à l’ennui et au besoin. Il nous a donné une raison d’exister en travaillant, en créant et a été précisé que c’est dans l’effort que nous réussirons : « tu travailleras à la sueur de ton front ». On constate alors que la faculté essentielle qui nous impulse et nous promeut est fondamentalement le désir. Il est essentiel pour nous aider à parvenir non pas seulement au plaisir qui n’est qu’une étape mais au bonheur qui est la réalisation de soi. Nous pouvons conclure alors que chacun a son paradis entre ses mains et qu’il lui appartient de le construire à travers le triptyque désir-effort-plaisir. Nous avons le choix : céder au plaisir de la récréation immédiate, ou bien œuvrer dans la recherche de la création durable de soi-même.
Mais alors, toute la modernité trépidante soutenue par des vendeurs d’illusions tend à nous faire croire que ce qui est important aujourd’hui, c’est la priorité au plaisir. Non, le travail n’est pas important et surtout l’effort pour réfléchir et entreprendre n’est pas utile car l’État, les religions et les innombrables media travaillent pour nous. Vivons au présent, perdons-nous dans les plaisirs infantilisants et aliénateurs obtenus sans même désirer. Au final, on ne rêve plus, on n’aspire plus à rien et la volonté ne poursuit plus d’objectif. Celui-ci viendrait sans effort.
Regardez notre jeunesse par exemple, rien ne semble l’intéresser sinon la satisfaction immédiate de tous les plaisirs. On veut être tout de suite riche donc on fait de la politique ou on devient gayman ! On veut sortir la demoiselle du quartier ? On lui achète un phone ou quelques babioles coûteux et on en use à satiété. Notre école n’est effectivement pas compétente mais elle est nécessaire ; alors on préfère tricher ! En conclusion, on s’ennuie et on passe le temps à chercher d’autres plaisirs de plus en plus déviants qui nous plonge à la fois dans une soif inextinguible et un mal être général. Malheureusement, nous les adultes sommes coupables, c’est la société actuelle, par le type d’éducation donné à nos enfants qui est responsable. Cette éducation prépare à l’incompétence, à la bêtise car, on ânonne, on compile mais on n’apprend rien de concret qui façonne l’esprit et promeut la volonté ! Pire, on victimise, on décrédibilise l’enfant qui est né du mauvais côté dans un pays à « économie dominée » comme le disent si bien nos géographes compétents ! Vous avez compris : le ver est souvent dans le fruit !
Du côté des parents, une éducation tronquée et inefficace a produit des cadres incompétents et timorés qui, malgré les louanges à la gloire des éternels dirigeants africains végètent dans les fins du mois difficiles. Leur vie se résume à expédier leur boulot et à se laisser vivre par procuration : la télévision qui permet de suivre les gladiateurs des temps modernes dans les arènes de foot ou de boxe ; les bars et lieux de luxure ou encore les églises de la grâce. Mais la solution est où ?
Elle est là. Simple et efficace. Comme il nous a été dit dans la Bible, il faut sortir de l’enfance du jardin d’Éden pour se prendre en charge. Cette prise en charge est dans une éducation efficace, équilibrée et compétente à travers une refonte complète de curricula allégés, homogène et contextualisés. Les techniciens savent mais refusent de parler au risque de se faire taper sur les doigts ; les politiciens avisés savent mais refusent d’agir pour le moment car il ne faut pas froisser les amis qui nous donnent. Mais c’est connu : la main qui donne, ordonne !

Maoudi Comlanvi JOHNSON, Planificateur de l’Education, Sociologue, Philosophe

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