84,18% au CEP ; 56,72% au BEPC et 50,10% au BAC : Satisfaits, des enseignants récusent la thèse du taux de réussite politique (Ils plaident pour le maintien du cap) - Journal Educ'Action - Éducation au Bénin et dans le monde

84,18% au CEP ; 56,72% au BEPC et 50,10% au BAC : Satisfaits, des enseignants récusent la thèse du taux de réussite politique (Ils plaident pour le maintien du cap)

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84,18% au CEP, 56,72% au BEPC et enfin 50,10% au Bac 2019. Ces différents taux de réussite aux différents examens semblent apporter la joie au cœur des acteurs du système éducatif béninois. Educ’Action, curieux de connaître les raisons justificatives desdits taux, a tendu son micro à quelques acteurs du système. Voici ce qu’ils en disent…

AVIS DE QUELQUES ACTEURS

Hervé Kinha, Coordonnateur national de la Coalition Béninoise des Organisations pour l’Education Pour Tous (CBO-EPT)

«« A priori, mes impressions sont très bonnes parce que les parents d’élèves ne veulent que la réussite de leurs enfants en fin d’année scolaire. Je pense qu’il y a lieu de se réjouir pour ces résultats parce qu’il y a très longtemps, nous avons obtenu des résultats de ce type qui nous donnent chaud au cœur. Notre souhait aurait été que tous les enfants réussissent aux différents examens, mais ce n’est pas le cas. Nous avons atteint la moyenne de 50 à 60% pour tous les examens scolaires. Je dirai bravo à tous les acteurs du système éducatif à commencer par le gouvernement qui s’est résolument engagé pour améliorer le système éducatif au Bénin, bravo au corps enseignant et aux parents d’élèves qui se sont investis pour que les résultats soient ce qu’ils sont aujourd’hui. Cela dit, lorsque je regarde un peu le CEP qui a donné 84,18%, ces résultats ne devraient pas nous étonner outre mesure. C’est tout à fait normal de mon point de vue parce que l’année dernière, les résultats étaient très bas et il y avait beaucoup de redoublants et ce sont ceux-là qui ont redoublé d’ardeur au cours de cette année scolaire et qui ont réussi. Idem pour le BEPC qui avait donné un score très bas et assez de redoublants ayant tiré cette année, leur épingle du jeu. Je dois dire aussi que cette année a été particulière parce qu’il n’y a pas eu de grèves. Pour garder ce cap les années à venir, je pense qu’il y a toujours des écueils que nous devrons corriger. Quand vous prenez l’enseignement primaire, c’est à peine qu’on a 70% d’enseignants qualifiés. Quand vous prenez le Secondaire, ce sont les vacataires qui sont les enseignants les plus utilisés. Ils n’ont pas reçu de formation, même s’ils en ont reçues, ce sont des formations de courtes durées. Heureusement que l’Etat s’est doté d’une politique nationale de l’enseignant qui promeut la professionnalisation des enseignants dans les différents ordres. Maintenant, la motivation des enseignants constituent aussi un challenge. Il faudrait que le gouvernement trouve les moyens pour motiver les enseignants. Quand je prends pour le Bac, je pense que c’est un résultat à encourager, mais le problème que ça pose, c’est la gestion du flux à l’Université. Est-ce que notre Etat est préparé pour mieux gérer ce flux? Globalement, il y a matière à se réjouir si au niveau des différents jurys de délibération, il n’y a pas eu de rachat, et que les résultats proclamés ont été sincérité. »

Sagbo Damien Dossa, Conseiller Pédagogique et syndicaliste à la retraite

«Je commence d’abord par dire d’emblée que ce ne sont pas des résultats politiques. En tant qu’ancien, avec tout ce que nous connaissons du passé, il y a eu beaucoup d’efforts du côté de l’Etat et des autres acteurs du système éducatif. Les résultats ont dépassé 50% et cela se justifie par beaucoup de facteurs. Par le passé, l’école a rencontré beaucoup de problèmes, des écoles démunies, manque de matériels, d’infrastructures, pénurie d’enseignants, des parents démissionnaires, la non satisfaction des revendications etc. Mais aujourd’hui, l’Etat a pris des mesures. Il a amélioré les conditions des enseignants. Et quand on considère ce qui s’est passé au cours des deux dernières années, l’Etat a relevé de leurs fonctions tous ceux qui ont donné de mauvais résultats et par la suite, chaque enseignant a commencé par faire des efforts pour s’améliorer. Il y a eu amélioration de ce côté-là parce qu’ils ne veulent plus être relevés de leurs fonctions. Il y a eu les cantines scolaires et les parents ont pris également conscience. C’est ce qui fait que depuis deux ans, les résultats ont commencé par s’améliorer. Mais si à l’école on est censé avoir 100% et qu’on a que 50% ou même 60, ça ne va pas. Donc, tous les acteurs de l’éducation, les parents, les enfants, les enseignants, les autorités ont une partition à jouer. Nous devrons continuer et aller plus loin et savoir qu’il y a encore du chemin à faire. »

Alexandre Adjinan, enseignant du Secondaire, impliqué dans les travaux du Baccalauréat

«D’aucuns disent que c’est l’absence de grève qui est à la base des bons résultats et d’autres parlent également de résultats politiques. Je crois que nous devrons faire des analyses objectives. Parlant de facteurs ayant favorisé ces résultats, il faut dire que depuis 3 ans déjà, un arrêté a été pris par l’ancien ministre des Enseignements Secondaire Technique et de la Formation Professionnelle, Lucien Kokou faisant obligation à tout apprenant de la classe de 3ème d’avoir à la fois le BEPC et la moyenne de classe avant de passer en classe de seconde. Je crois que ce facteur incite à un effort beaucoup plus accru au niveau des apprenants. Lorsque l’apprenant sait que sans le BEPC et la moyenne de classe, il ne peut pas se retrouver en classe de seconde, il doit redoubler d’efforts. Les parents ont également pris conscience de la situation et accompagnent leurs enfants autant que possible. En dehors de ça, il y a également une réforme au niveau de l’office du Baccalauréat. C’est que lorsque vous n’avez pas le BEPC, vous n’êtes pas autorisé à passer le Baccalauréat. Ces décisions ont été prises, il y a trois ans, ce sont ces apprenants-là qui ont passé le Bac 2019. Donc, il y a des raisons que nous ayons des résultats satisfaisants et l’autre aspect, c’est que les enseignants méritent d’être félicités parce qu’ils ont donné le meilleur d’eux-mêmes malgré tous les problèmes auxquels ils ont été confrontés, malgré l’absence du dialogue pour poser et régler les problèmes qui sont les leurs. Ils ont donné le meilleur d’eux-mêmes à tous les niveaux et l’encadrement a été également renforcé par les CP et les Inspecteurs, malgré le déficit criant à ce niveau aussi. Ce serait trop tôt de dire que c’est à cause de l’absence des grèves parce qu’il y a des années sans grèves où on n’a pas eu de bons résultats et il y a des années perturbées où les résultats n’ont pas été pour autant mauvais. Donc, si cela ne s’inscrit pas dans la durée, on ne saurait dire que c’est à cause de l’absence des grèves que les résultats sont bons. Et pour que cela s’inscrive dans la durée, il va falloir régler les problèmes des enseignants. L’autre facteur qui a favorisé ce fort taux de réussite, c’est la qualité des épreuves. Ce n’est pas pour dire que les épreuves sont de mauvaises qualités, mais pour dire que les épreuves peuvent être abordées par le candidat que nous appelons le candidat moyen. Les épreuves ont été aussi abordables et tous ces éléments ont concouru au fort taux de réussite que nous avons connu. Les hommes politiques imputent ces taux de réussite au gouvernement, prétextant des réformes, mais moi, je ne vois pas ce qu’on a appelé réforme qui ait contribué à ce fort taux de réussite-là. Si c’est l’absence de grève qu’on appelle réforme, je dis non parce que ce n’est pas ça la solution. Lorsque vous ne permettez pas aux gens de manifester, d’aller en grève, vous devrez régler leurs problèmes. Si vous ne réglez pas les problèmes, il arrivera un moment où les gens vont désobéir. Ce n’est pas notre souhait. »

 

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